À Avessac, en Loire-Atlantique, Mathilde Roger-Louët fabrique des glaces à partir du lait de ses vaches. À l’approche de Noël, elle se lance dans la préparation de bûches glacées, le fruit d’un long travail en amont.
Comme le père Noël, Mathilde Roger-Louët et ses bottes s’invitent à la table des fêtes. Ses créations ne passent pas par la cheminée, mais par le congélateur : Mathilde Roger-Louët est paysanne glacière. Elle invente des parfums de glace et des desserts glacés, comme le vacherin, l’omelette norvégienne ou la bûche de Noël. Le lait provient des vaches de sa ferme, à Avessac (Loire-Atlantique), qu’elle gère avec son mari Yoann Louët, en bio.
Aujourd’hui, place à la décoration de la bûche de Noël « Tatin revisitée ». Une génoise à la base, une gelée de pommes au pommeau, de la crème glacée caramel et vanille en guise de manteau. Le tout surmonté d’une chantilly et de morceaux de chocolat.
Glaces, gelée et génoise étant assemblées, Mathilde se lance dans la chantilly. Pour cela, elle verse dans un grand bol de la crème et du sucre, confié aux bons soins d’Alain, le pétrin. Comme Arthuro le pasto (pasteurisateur, pour faire la glace), Marcel le lave-vaisselle, ou encore Pauline la turbine, Alain le pétrin est l’un des fidèles lutins œuvrant dans le laboratoire de Mathilde. J’ai commencé avec Pauline la turbine, qui est ma sœur de cœur, explique-t-elle. Chaque prénom me fait penser à des amis, des gens qui m’ont accompagnée, ou des lectures que j’ai aimées.
Changement de bottes
De son laboratoire, à travers une haie de chênes et de châtaigniers, Mathilde peut apercevoir ses vaches paître. Elles sont traites matin et soir, et une partie de leur lait est récupéré par la paysanne pour ses glaces. À la moindre alerte, changement de bottes ! Mathilde troque les blanches contre les vertes et part s’occuper des animaux. Pour moi, les glaces n’auraient pas la même valeur si je ne pouvais pas suivre leur fabrication de A à Z.
Chaque vache à son prénom, et certaines sont des spécialistes de la glace au chocolat : Pour que sa texture soit agréable, le lait doit être plus gras, ce qui est le cas des vaches en fin de lactation, explique Mathilde. C’est donc Picasso, Pâquerette ou encore Jupette qui s’y collent. Le troupeau est nourri avec des aliments provenant de la ferme, en particulier l’herbe pâturée directement dans les prés. Nous essayons d’être les plus indépendants et autonomes possible, explique Yoann Louët, qui a converti la ferme familiale en bio en 2009.
Non issue du milieu agricole, Mathilde a dû se former à l’élevage. Cela n’a pas forcément été inné ! Mais c’est un beau relationnel. On a beaucoup à apprendre des vaches. Pendant que monte la chantilly, elle raconte son installation à la ferme, après avoir rencontré Yoann. J’ai un BTS dans le transport routier de marchandises. Alors j’ai tout appris sur place : la traite, les soins, le monde agricole… En parallèle, j’étais auxiliaire de vie dans une maison de retraite.
L’idée d’un projet sur la ferme mûrit au sein du couple et Mathilde se lance dans les glaces. Plus jeune, j’avais fait mes saisons d’été chez des glaciers sur la côte, cela m’avait plu. Elle commence à créer dans sa cuisine, avec un Magimix gelato. Car pas question pour la paysanne glacière de suivre un livre de recettes !
Mathilde met de côté pour se former auprès des plus grands : Gérard Taurin, ancien responsable du pôle desserts glacés chez Lenôtre, meilleur ouvrier de France glacier, champion du monde de la glace et Luc Debove, meilleur ouvrier de France et champion du monde de la glace, actuellement directeur de l’école Ducasse à Yssingeaux (Haute-Loire). Elle est aujourd’hui membre de la confédération nationale des glaciers de France.
Formules magiques
Mathilde valide la consistance de la chantilly. Douille à la main, elle décore soigneusement chaque bûche. La minutie de l’exercice ne l’empêche pas d’expliquer en même temps la technicité du métier. Créer de nouveaux parfums est un art, mais aussi un casse-tête mathématique. Je veux travailler avec des fruits frais, or leur taux de sucre varie, ce qui impacte la recette. Il faut refaire des calculs à chaque nouvel arrivage, la moindre modification de proportions pouvant avoir une incidence sur la texture ou l’aspect visuel, explique Mathilde. Une formule magique à perpétuellement ajuster !
Sa carte compte une quinzaine de parfums, sachant que l’élaboration d’une recette demande 4 à 6 mois. Toutes les créations ne sont pas des succès : J’ai essayé parfum lavande, mais honnêtement la glace avait un goût de savon, reconnaît Mathilde en riant. Les derniers sont verveine, cidre et gin, sorti spécialement pour Noël.
La chantilly installée, place au décor chocolaté. L’opération, délicate, se fait à la pince à chocolat. Pour obtenir ces jolies et délicieuses branches de cacao, Mathilde a trempé dans un bain de whisky froid du chocolat fondu. Les bûches partent ensuite en chambre froide, où elles attendront les gourmands de Noël.
Et à la table des Roger-Louët, quelles bûches trouve-t-on à Noël ? La Tatin est très demandée par les enfants, sourit Mathilde. Ma mère, c’est plutôt la bûche verveine abricot et gelée de cassis. Et bonne nouvelle, si comme le père Noël, la paysanne glacière s’affaire pour les Fêtes, ses glaces peuvent être dégustées toute l’année.
Pour avoir goûté ses préparations glacées, je dois avouer que la qualité est au rendez-vous. Elle créée elle-même ses recettes et les produits sont sains et locaux, de haute qualité gustative (mes papilles en témoignent) ! De plus, Mathilde Roger-Louët est dans une démarche de valorisation du travail et de la place des femmes dans l’agriculture, notamment avec le film-documentaire « Croquantes », qui a été plébiscité par le public et la presse. J’ai découvert en elle une personnalité atypique, engagée, combattante, avec un réel engagement en faveur de l’humain et de l’environnement. Merci 😉
Bonjour,
J’ habite à Paris. Où peut-on trouver vos fameuses glaces ??
Dans l’attente de votre retour,
Bien cordialement,