Quel jardinier n’a jamais utilisé de terreau ? Ce substrat essentiel au semis, repiquage et rempotage des plantes n’arrive pas tout seul dans son sac. Il résulte d’un savant mélange de différentes matières premières. Problème, il se compose en majorité de tourbe, dont le prélèvement abîme les milieux naturels. Et si on cultivait avec du terreau renouvelable ?
Imaginez-vous être dans votre cuisine alors que vous vous apprêtez à réaliser une recette compliquée aux multiples ingrédients. Sauf que la recette en question ne se pèse pas en gramme mais en tonne. Le garde-manger est en fait une plateforme de plus de 1000 m² où les ingrédients sont stockés en tas vertigineux qui se déclinent sous une multitude de couleurs naturelles.
En lieu et place des cuillères et balances, ce sont trois chargeuses aux godets métalliques et aux moteurs vrombissants qui prélèvent, pèsent et mélangent la composition de chaque recette. Le ballet rapide et incessant de ces engins témoigne de l’habileté des « cuisiniers » logés derrière le volant dans les cabines.
Ça y est vous y êtes, au cœur de la fabrication du terreau ! Ce précieux mélange qui fera ensuite grandir fleurs et légumes dans les jardins. S’il vous apparaît homogène lorsque vous ouvrez le sac, le terreau est en réalité un mélange savamment dosé de plusieurs matériaux.
Cette curieuse cuisine à ciel ouvert, il est possible de l’observer à Saint-Mars-du-Désert en Loire-Atlantique sur l’un des dix sites de production de l’entreprise La Florentaise. Ici ce sont plus de 450 recettes différentes de terreau qui sont produites par les conducteurs de chargeuses. Ils ont la liste en cabine et ils réalisent les différents mélanges au fur et à mesure de la journée, explique Margaux Lucienne, qui gère la communication au sein de l’entreprise. Cette unité de production de terreau a la particularité de se situer dans le voisinage d’une ancienne tourbière exploitée par la Florentaise, il y a quelques années.
Mais de tourbe aujourd’hui il n’est plus question. En effet l’exploitation de ce produit abîme le milieu naturel. Les tourbières sont des zones humides qui abritent une biodiversité végétale et animale importante. Elles permettent également de stocker l’eau en hiver lorsqu’elle est en excès et de la relarguer dans les cours d’eau pendant les sécheresses estivales. La tourbe en elle-même résulte de la dégradation de la matière organique sur des laps de temps très long. Lorsqu’elle est exploitée pour faire du terreau, il faut des centaines d’années pour recréer ce type de sol.
Si la Florentaise en importe encore pour certains clients professionnels, l’entreprise propose de plus en plus de terreau sans tourbe, notamment à destination des particuliers. Amis jardiniers amateurs, vous ne pourrez plus dire que vous ne saviez pas !
Pour substituer en partie la tourbe jusqu’alors essentielle à la fabrication du terreau, la Florentaise a lancé il y a vingt ans un produit constitué partiellement de bois broyé : l’Hortifibre®. En terme commercial, c’est un travail de longue haleine, surtout avec les professionnels. Au début, on nous riait au nez. Cela fait seulement trois à quatre ans que l’Hortifibre® a trouvé sa place sur le marché, se souvient Margaux.
Si ce produit a des caractéristiques proches de la tourbe, il n’est pas pour autant identique à celle-ci, notamment en matière de rétention d’eau. Ce qui explique pourquoi il n’en remplace qu’une partie dans le terreau. Mais depuis 2016, la Florentaise a trouvé la parade à ce problème. L’entreprise mélange le bois broyé avec de l’écorce de pin, elle aussi broyée. Les deux produits assemblés produisent un mélange qui permet cette fois de se passer complètement de tourbe. Ce terreau a été nommé Turbofibre®. L’aspect est peut-être un peu plus granuleux et moins noir qu’un terreau classique mais pour les caractéristiques agronomiques, ce sont les mêmes, affirme Margaux. Cerise sur le gâteau, bois comme écorce de pin maritime sont en fait des déchets de scieries qui sont réutilisés ici.
La recette semble facile une fois assemblée, il a pourtant fallu plusieurs années de recherche et développement pour en arriver à ce stade. Un terreau doit pouvoir tenir jusqu’à trois ou quatre ans avant que la plante soit rempotée. Chaque nouvelle recette doit donc être étudiée sur cette période pour vérifier qu’elle fonctionne, explique Margaux. Eh oui, une plante met plus de temps que nous à goûter son plat…
Attention, il ne s’agit pas de simplement vérifier que la plante s’est développée. Pour chaque test, les sujets sont étudiés sous toutes les coutures. Pour ce faire, le producteur de terreau a racheté la serre d’un horticulteur voisin. C’est ici que les plantes poussent avant d’être mesurées, notées et pesées.
Margaux fait office de cobaye pour évaluer et classer selon leur aspect les fleurs qui ont poussé sous différentes modalités de terreau. Mais chut ! Les résultats des tests ne seront pas évoqués. Ce qui est dans les pots reste dans les pots.
Je n’ai pas bien compris! Faut-il se passer de terreau ??
peut-on visiter ce site?
Bonjour,
Un petit complément à l’article qui indiquerait où se procurer ce précieux mélange serait très utile aux jardinier.e.s que nous sommes.
Merci d’avance 🙂
Je pense que la plateforme de production est beaucoup plus grande que 100 m²! 1 hectare peut-être?
Effectivement, vous avez raison.
On est plutôt sur 1000m², c’est mis à jour dans le texte !