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Le champ des six reines

La Smala bruxelloise, des filles, des légumes et des idées

Pour fournir en légumes frais leur activité de traiteur Smala Cooking, Arth, Anaïs et Zophia se sont enracinées dans une parcelle en bordure de la capitale belge. Ces néo-maraîchères urbaines se débrouillent comme des cheffes !

Ces rangées verdoyantes et ces serres bien ordonnées étaient encore une prairie à chevaux il y a six mois. Girl power ! ©Thomas Louapre

Coiffé de ses longues tiges d’un vert intense, un imposant fenouil émerge d’une rangée d’autres géants. Énorme, hein ? sourit Anaïs en tenant le spécimen à bout de bras. Son destin est déjà tracé : il finira croqué dans une soirée crowdfunding pour un collectif de brasseurs où Anaïs et sa compagne Arth vont assurer le buffet. Ou bien dès l’apéro de ce soir ? Tiens, les poivrons sont sortis, je n’avais pas vu !

Déjà, l’énergique jeune femme se jette sur une autre rangée de légumes baignés du soleil de juillet. Comme tous les mercredis matins, Anaïs inspecte de fond en comble cette parcelle maraîchère un peu particulière : elle est située à Anderlecht, dans l’agglomération même de Bruxelles ! En répondant à un appel à projets du ministère bruxellois de l’Environnement, Arth et Anaïs, fondatrices de Smala Cooking, ont mis la main cette année sur cette terre fertile et dépassé leur statut de cuisinières : On s’est dit qu’on allait boucler la boucle, on est traiteurs du champ à l’assiette !

Des légumes du soleil en plein Bruxelles pour nourrir les urbains : le projet des filles de Smala ne manque pas de piquant. ©Thomas Louapre

Serre canon pour vitrine agricole

Patidou, butternut, potimarron, brocoli, chou… difficile de croire, devant la variété et les quantités produites, que la parcelle était encore une prairie à chevaux six mois auparavant, et que les premiers légumes ont été mis en terre il y a trois mois. Depuis un mois, à chaque fois que l’on vient, ça a doublé, assure Anaïs en entrant dans la serre. Là c’est un truc de dingue, ça a monté ! C’est les légumes du soleil : tomates, courgettes, aubergines, basilic. Ça y est, il y a nos concombres qui sortent.

Ah c’est canon, hein ? C’est surtout très bien tenu : les rangées de légumes sont impeccables, la serre bien rangée, et des parcelles de fleurs en mandala accueillent le visiteur à l’entrée. Anaïs prend même soin de ne pas cueillir le pourpier au début de la planche afin de ne pas la dégarnir. Dans l’appel à projet, c’était annoncé : le champ doit être joli, c’est une vitrine de l’agriculture bruxelloise ! C’est à ce prix qu’un bail de vingt-sept ans a pu être signé. Avec une association voisine, on est les deux premiers projets à s’installer sur le long terme à Bruxelles, ajoute la jeune femme avec un brin de fierté.

Un effet meuf

Le plan de culture est entre les mains de Zophia, qui complète le trio. Informaticienne à la police, elle passe tous les soirs au champ en rentrant du travail. On est entre nanas, c’est assez sympa, assure Anaïs, dont la parcelle accueille aussi Emilia et ses tisanes Hierba Buena. Il y a aussi notre pote Julie qui a mis ses ruches ici. L’organisation est fluide, pas besoin de se voir tous les jours pour faire passer les infos. Zophia m’a fait la liste de ce que je dois cueillir : pourpier, laitues…  Elle me dit plus ou moins les quantités, mais comme elle est frileuse, je cueille toujours un peu plus ! De son côté, Arth n’a aucune recette établie, elle fait tout au feeling, c’est génial. Je cueille, je l’appelle et je lui dit : il va falloir faire des tapas de fenouil ! On a trois caractères qui se complètent parfaitement. C’est cette complémentarité qui a été utile pour l’appel à projets.

En une petite heure, Anaïs a déjà rempli quelques cagettes, qu’elle asperge d’eau fraîche avant de les embarquer dans la camionnette. Comme tous les mercredis, les trois copines organisent un apéro devant leur cuisine de Saint-Gilles, un quartier populaire du centre de Bruxelles.

Le trio qui déménage : Arth, Anaïs et Sophia. ©Thomas Louapre

Vente au kilo et photo de pesto

Les tables dressées sur la petite place, entre les jeux de ballon et une table de ping-pong, sont balayées par un léger vent d’été et une musique chill sortie d’une petite enceinte. Il est 19 h, Zophia a dressé son stand de fruits et légumes, entourée de gamins du quartier à qui elle parle en flamand. Voici mon équipe ! s’amuse-t-elle, au milieu des minots qui jouent à la marchande. 

On doit tous manger des bons produits.

C’est ma grosse motivation, l’universalité. On doit tous manger des bons produits. Anaïs, en pleine préparation de l’apéro, complète : Le but de Smala Farming c’est d’abord de nourrir les Bruxellois en légumes frais. En plus des ventes directes de légumes devant l’atelier, l’an prochain on va peut-être faire de la vente au champ. Au passage, on apprend le poids des fenouils géants : 800 grammes. Ca fera 3 euros 20, s’il-vous-plaît.

Des légumes frais du matin et une grande cuisine en plein Bruxelles : Arth s’éclate ! ©Thomas Louapre

La vitrine donne en plein sur le plan de travail d’Arth, couteau à la main et air concentré. Elle tend à Anaïs un pesto de fenouil aux graines de tournesol : Tiens mon amour, qu’est-ce que t’en penses ? Le plus grand bien, évidemment. D’autres variations de fenouil, crues et rôties, complètent l’assiette qu’Anaïs prend en photo pour les réseaux sociaux, en notant une commande de l’autre main.

La terrasse est pleine, une trentaine de couverts devraient être servis ce soir. Petit à petit, le mot passe, la cuisine et le petit marché de Smala se font une réputation. Je suis optimiste pour l’an prochain, on pourra démarrer la saison plus tôt, assure Zophia, qui travaille encore aux 4/5 et aimerait, à terme, quitter son emploi pour embrasser la carrière de maraîchère. On a une chance énorme d’avoir un champ à Bruxelles ! Je suis impatiente, mais pas trop pressée quand même : je vais tout juste prendre mon premier week-end libre de l’année ! C’est le métier qui rentre.

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