Hier cantonné aux hauts plateaux des Andes, depuis les années 2010, le quinoa conquiert le monde. On le trouve désormais partout, même en France. Retour sur une ascension un peu trop fulgurante.
L’histoire commençait bien. Cultivé depuis des millénaires par les paysans andins, le quinoa est un élément essentiel de la culture et de la vie de milliers de personnes au Pérou et en Bolivie. Il leur apporte une quantité record de protéines et d’acides aminés, est parfaitement adapté au climat andin et peut y être cultivé facilement. Jusqu’aux débuts des années 2000, sa consommation restait largement concentrée dans cette région du monde, notamment chez les populations les plus pauvres.
C’est là que l’histoire dérape. En quelques années à peine, raconte la journaliste Marthe Rubio dans son édifiant documentaire « Quinoa boom », cette herbacée a conquis le monde. Entre 2012 et 2014, les exportations de quinoa vers les Etats-Unis et l’Europe ont bondi de 260 %. Dans le même temps, son prix a explosé, dépassant même les 9 000 euros la tonne en 2013, entre 5 et 10 fois plus que les céréales de base comme le blé. Le quinoa est devenu l’« or des Andes ». Le Pérou et dans une moindre mesure la Bolivie ont encouragé son exportation, au détriment parfois des populations locales. Des intermédiaires ont investi le marché et se sont enrichis sur le dos des producteurs. L’explosion de la demande a aussi poussé les paysans à intensifier leurs méthodes et à recourir massivement aux pesticides pour réussir à le cultiver en milieu moins favorable.
Depuis 2013, l'Organisation mondiale pour l'agriculture et l'alimentation (FAO) a encouragé la culture du quinoa dans 27 pays en développement.
Voilà pour le cœur de l’histoire du quinoa, franchement déprimante il faut le dire. Mais dans le même temps, le succès de cette pseudo-céréale chez les consommateurs a encouragé des agriculteurs du monde entier à en produire localement. Depuis 2013, l’Organisation mondiale pour l’agriculture et l’alimentation (FAO) a encouragé la culture du quinoa dans 27 pays en développement, notamment la Somalie et l’Irak. Aux Etats-Unis comme en Chine, des agriculteurs se lancent dans la production pour le marché local.
Et en France ?
En 2013, nous avions interviewé les pionniers du secteur. Parmi eux, l’américain Jason Abbott. Il a créé en Anjou son entreprise en 2008 afin de produire des semences de quinoa adaptées aux conditions locales. Associé à l’université de Wageningen aux Pays-Bas et à la Coopérative agricole du Pays de Loire, il est parvenu à des résultats satisfaisants et commercialise ses semences dans toute l’Europe. Aujourd’hui, il assure même « refuser chaque semaine des demandes d’agriculteurs » : « Il y a énormément d’agriculteurs qui veulent produire du quinoa, sans toujours savoir comment vendre leur production. Mais je les préviens toujours : ce n’est pas évident à vendre. En 2015, la production française a largement dépassé la demande, beaucoup d’agriculteurs ont dû stocker leur production. Il faut bien réfléchir aux débouchés, par exemple en vente directe. »
Baby quinoa
Didier Bazile, agroécologue auteur en 2015 du « Le quinoa, les enjeux d’une conquête », confirme que le quinoa made in France en est encore à ses balbutiements : « Jason Abbott, en Anjou, est parvenu à des variétés adaptées aux climats européens, avec un accompagnement technique, une vraie réflexion de filière. À côté de ça, il y a beaucoup d’agriculteurs et d’initiatives beaucoup moins connues, des gens qui récupèrent à droite ou à gauche des semences qui ne sont pas adaptées aux conditions pédoclimatiques. Il leur faut souvent plusieurs années pour parvenir à un résultat. »
Et les agriculteurs qui ont passé le cap, ils en pensent quoi ? Pierre Jeanjean, de la ferme éponyme basée à Senonches dans le Perche, a produit pas loin de 4 tonnes de quinoa sur 8 hectares l’an dernier. Il n’envisage pas d’augmenter sa surface de production : « Ça reste très difficile à cultiver. Les rendements ont été assez décevants jusque-là. Il y a beaucoup de choses qui restent à comprendre, au niveau technique. »
En France, le quinoa bio est difficile à trouver.
David Peschard, installé à la ferme des 4 vents dans le Loir-et-Cher, cultive, lui, la céréale en bio. Il nous a répondu au téléphone, depuis son tracteur. On était content d’avoir son avis car la production en bio est rare dans l’Hexagone. Jason Abbott n’a, par exemple, pas poursuivi longtemps ses recherches dans ce sens : « J’ai trouvé le bio extrêmement difficile au niveau technique. Sans ajouter d’azote fractionné au bon moment, c’est très compliqué. » Didier Bazile nous a confirmé : « En Anjou, 95 % de la production est en conventionnel. C’est un peu contradictoire avec l’image du produit qui est une image d’un produit très sain. On peut considérer que ces producteurs bénéficient de cette image fortement ancrée dans notre imaginaire collectif, et du fait que le consommateur ne se préoccupe pas de savoir si c’est bio ou pas pour l’instant. »
Bio versus conventionnel ?
David Peschard, lui, assure que la production n’est pas si complexe : « Pour le bio, ce n’est pas compliqué, il y a un semis et une récolte, un peu de binage entre temps, c’est tout. Les deux dernières années ont été catastrophiques au niveau climatique suite à des sécheresses et à des excès d’eau, pour le quinoa comme pour les céréales traditionnelles, on a eu des rendements très faibles. En bio ou conventionnel, ça n’aurait rien changé, on aurait eu aussi des résultats catastrophiques. C’est sûr que notre potentiel est moins élevé qu’en conventionnel mais moi j’amène du compost, ça permet d’assurer un rendement d’une tonne par hectare. En conventionnel, ils font deux fois plus de rendements. »
À quoi ressemblera le quinoa français dans quelques années ? Pierre Jeanjean et David Peschard estiment que le quinoa a un bel avenir, surtout s’il est produit localement et vendu en vente directe. Jason Abbott espère, lui, en faire un produit de grande consommation, à l’instar du riz basmati passé en quelques années du statut de niche à celui d’incontournable de nos placards. Il souhaite par exemple que le quinoa entre dans la composition des plats préparés, « pour que les gens le goûtent une première fois, sans avoir à se demander comme il faut le cuisiner ».
Bio ou pas, il n’y a pas vraiment de différence pour le consommateur, car le quinoa fait partie de ces cultures dites « orphelines », c’est à dire pour lesquelles il n’y a pas de pesticides autorisés.
Les principales différences qu’il existe entre les quinoa français, d’un producteur à un autre, provient de la saponine, présente ou non! Seul Jason Abbott a réussi, avec l’aide de l’Université, à sélectionner des variétés sans saponine, qui est une toxine qu’on retrouve sur les graines, et qui a 2 effets majeurs : d’abord c’est très amer et peu agréable au goût, et ensuite, c’est une toxine, donc moyen pour la santé, même si le quinoa est bio. Et d’ailleurs, la plupart des quinoa bio contiennent de la saponine! pour s’en débarrasser, préparez vous à laver, laver et encore laver!!!
je le commende ou car moi si je minquiette je veux du bio merci de me répondre .
Article très intéressant, et bienvenu.
J’aurai aussi aimé savoir si le quinoa européen possède les mêmes qualités nutritives et énergétiques que le quinoa traditionnel d’Amérique du Sud.
Aussi, j’ai fait une expérience avec du quinoa français « doré » bio, très bon au goût
mais que j’ai payé une fortune, je devrais dire une FORTUNE !!! par curiosité j’ai
tenté une petite quantité en vrac. Je me suis demandée si l’exagération du prix provenait du producteur ou du magasin.
Après avoir essayé plusieurs fois le quinoa français, nous sommes revenus au péruvien que nous consommons depuis des années, bien meilleur.Après enquête autour de nous,nous ne sommes apparemment pas les seuls.
Dommage.
Bravo à celles et ceux qui cultivent en BIO, seule issue pour sauver notre belle planète. Bravo d’avoir osé, Bravo pour nous, et Bravo pour toutes les générations à venir
Bonjour.
J’ai des doutes sur la culture BIO du « kinoa d’Anjou » !
J’ai acheté un sachet (en Vendée !), et nul part n’est indiqué « BIO » sur le sachet !
J’ai vu le reportage à la TV sur cette culture du kinoa en France, et la présentation me faisait penser à de la culture bio !
A priori, il n’en est rien.
Celui de Vendée – est-il vraiment BIO ?
Merci
En plus le quinoa de Vendée que j’ai acheté aussi, n’a pas un gout aussi bon que celui importé du Pérou
Bonjour
Je suis prodocteur de quinoa en Vendée depuis 6ans.
Dans un groupement de 8 fermes ,
nous avons produits 120 t de quinoa biologique en 2016 que nous vendons en local et sur le marché national .
Nous trions l’avons et sechons la graine de quinoa pour une qualité irréprochable .
Contact Daniel Villeneuve
gielegumessecsbiodevendee@orange.fr
Bon, du coup le quinoa de Mélenchon, c’est une bonne opération ?
Effectivement, c’est mieux au pluriel. Merci pour votre commentaire,nous avons corrigé. Bonne journée,
Thibaut
J’aimerais connaître la définition du « climat européen »!!!
Quel dommage que l’article ne mentionne pas l’initiative de Kokopelli, « l’arche du quinoa ». Car le vrai problème, c’est que toutes ces semences « européanisées » de quinoa enrichissent de grands semenciers (via la fameuse université aux Pays-Bas), alors qu’on pourrait / devrait se diriger vers des semences libres. Sur le site de Kokopelli, une courte vidéo explique très bien tout ça !
c’est un peu démago, mais bon. Je crois que le sélectionneur qui a réussi à produire les semences en France a ouvert un marché à kokopelli. Sans lui, personne n’aurait pu revendiquer des semences libres. C’est un peu comme le mec qui vend des CD en se faisant appeler Johnny ! Mais au fait, kokopelli, ce n’est pas une asso dont les fondateurs se rémunèrent dans les 60 K€ par an? eh eh… correct le job…