Donnez-leur une poubelle, ils en feront un dessert. Les confituriers de l’antigaspi réinventent les recettes tout en créant des emplois d’insertion. Bienvenue dans la marmite de la deuxième chance.
Baptiste Bourdeau ne pouvait pas rêver plus beau cadeau pour ses trente ans : une cuisine toute neuve et des montagnes de bocaux ! Il en sort près d’un millier par semaine depuis début novembre, aux goûts les plus audacieux : pomme-papaye, courge-épices, banane-fraise… Ça commence à dépoter ! Le coordinateur de J’aime Boc’oh a investi une ancienne boulangerie de Cognin, près de Chambéry en Savoie, pour produire ces douceurs. Les travaux ont été permis par un financement participatif qui a explosé son objectif. Il faut dire que le projet est appétissant : les confitures et chutneys sont réalisés par des travailleurs en insertion avec des fruits et légumes sauvés de la poubelle.
La solidarité à fleur de pots
Et non, ce n’est pas sale ! Les invendus utilisés par J’aime Boc’oh, récupérés auprès de producteurs comme Les jardins de Cocagne ou des supermarchés, sont parfaitement consommables. Comme les 1,3 milliard de tonnes de fruits et légumes qui, selon les Nations Unies, finissent chaque année à la poubelle. Abandonné au champ car hors calibre, légèrement abimé lors du transport ou du stockage, oublié sur les étals des supermarchés ou au fond des frigos, un tiers de la nourriture échappe aujourd’hui à nos estomacs. C’est donc un tiers des ressources en terre et en eau de l’agriculture qui est jeté à la poubelle !
Un scandale environnemental que Baptiste a découvert lors des banquets festifs et participatifs de l’association Disco Soupe dès 2013 et auquel il a décidé de régler son compte à l’échelle locale, en empotant à tour de bras. De la marmite Disco Soupe sont d’ailleurs sortis deux autres projets de conserveries antigaspi : les confitures Re-Belle à Romainville (Seine-Saint-Denis), et Les Repéchés Mignons à Toulouse. On récupère 350 kilos de fruits et légumes par semaine, explique Colette Rapp, coordinatrice de Re-Belle, qui a lancé sa production en février 2015. Depuis le début du projet, on en est à 14 tonnes de fruits revalorisés ! C’est cool non ?
Un tiers des ressources en terre et en eau de l’agriculture qui est jeté à la poubelle.
Presque aussi cool que de créer des emplois d’insertion.
Six emplois dont quatre en insertion dans la cuisine de Re-Belle, trois autres pour fabriquer les Repêchés Mignons, et quatre chez J’aime Boc’oh. On est vraiment une structure tremplin, assure Baptiste. Les objectifs de production s’alignent sur les besoins des employés. Ce que je trouve beau c’est la mixité de l’équipe, de sentir qu’ici ils retrouvent une place, qu’ils ont du plaisir à se lever le matin. Deux recettes sont déjà nées de la créativité des cuistots en insertion : la Confiture du Philou (orange-banane) et le Délice de Diane (pomme-raisin), un jour où l’on avait récupéré trop de raisins.
Topinambour-clémentine ou pamplemousse-carotte ?
C’est d’ailleurs une constante chez les trois néoconfituriers : selon les arrivages, on en voit de toutes les couleurs ! Banane-orange c’est ma fétiche parce qu’on en collecte tout le temps, explique Colette, mais on a déjà testé 80 recettes ! La dernière en date c’est papaye-passion-poire, on verra si ça marche. On ne crée pas nos confitures à partir d’une demande des consommateurs mais en fonction de ce que l’on récupère.
Céline Julliat et Charlotte Jacob, porteuses de projet des Repêchés Mignons, poussent le jeu jusqu’à proposer des pots d’ananas-piment-poivre, courgette-gingembre ou poivron-vanille, sa préférée. Si l’on veut toucher des personnes en dehors du public sensibilisé à l’écologie, il faut provoquer la curiosité, justifie-t-elle. On montre aussi qu’il faut sortir des sentiers battus, réinventer la cuisine et la gestion des restes.
Après s’être frottés à la production, les empoteurs sont maintenant passés à la diffusion : Je serai incapable de relancer un J’aime Boc’oh dans une autre ville, confie Baptiste, et puis ça me plaît d’être un acteur de mon territoire. Alors nous débutons une formation pour que d’autres porteurs essaiment nos concepts, avec Colette des confitures Re-belles. L’idée ? Capitaliser sur nos expériences pour que d’autres puissent bénéficier de nos erreurs vécues et gagner du temps. Il y aura toujours besoin de petites structures comme la nôtre pour diminuer le gaspillage alimentaire. Céline a déjà un premier conseils pour ceux que l’aventure intéresse : Lancez-vous ! Faites des confitures chez vous, et faites-les tourner. N’hésitez pas à faire le tour des acteurs locaux de l’économie sociale et solidaire. Et contactez-nous, on est aussi là pour ça !
Pour retrouver les points de vente des douceurs antigaspi :
J’aime Boc’oh, à Cognin et Chambéry.
Re-Belle, à Paris et dans toute l’Île de France.
Les Repêchés Mignons, à Toulouse.
Le Bocal Local, à Pompignac et Bordeaux.
Les Confitures de Dominique, à Bordeaux.
Les confitures solidaires ECHANGE NORD SUD en Gironde font la même chose
Il y a de belles inventions avec les légumes et les fruits
formidable!
j’aimerai beaucoup dialoguer avec vous car cela m’intéresserai de monter un projet semblable sur Nantes
Bravo à vous!
Bravo et bon courage excellente idée 40 ans d experience en grande distribution si quelqu un monte ce genre de structure dans le departement 42 (loire) je veux bien mettre mon experience au service de cette experience
Egalement Babelicot à Brest qui concocte des tartinades et petits pots pour bébés à partir des légumes invendus !
Bonjour,
Je suis en train de lancer un projet qui ressemble à celui-ci en Loire-Altantique, c’est une belle aventure. Mettre du lien entre écologie et réinsertion, c’est semer son coeur… et récolter au centuple !
La question du bio se pose en effet, cher Siffermann, les contraintes de traçabilité sont très strictes et difficiles à mettre en place quand on se lance, mais on y pense aussi !
Bonjour Christine,
Il y a-t-il un moyen de suivre (voire soutenir) l’évolution de votre projet? 🙂
Bonjour, j’espère que votre aventure marchera et je serai intéressée de découvrir vos produits quand ils seront en vente ? où êtes vous en Loire-Atlantique? Car il y a aussi les producteurs locaux qui ont peut être des restes (moins importants en quantité qu’en grande surface) surtout que les circuits courts autour de st Nazaire où j’habite, il y en a pas mal…
Superbe initiative ! Bravo à tous ! Puis-je trouver ces produits dans mon département, le Maine et Loire ? Et merci à vous, La Ruche, de toutes vos idées antigaspi, j’ adhère complètement !
chambéry se trouve en savoie et non haute savoie!!!
Super idée!! Mais je pense que tous ces fruits et légumes ne sont malheureusement pas tous issus de production bio ou raisonnée ou permaculture surtout quand c’est récupéré des super et hyper marchés. Mais c’est déjà un énorme investissement et engagement donc encourageons ces beaux projets!!
Simplement bravo!
Existe t-il des points de vente dans la Loire Atlantique ???