Halte au béton vert. Pour vivre caché dans son jardin secret, entourons-nous de plantes à croquer. Mode d’emploi pour créer des haies aussi gourmandes que diversifiées.
On en trouve dans la quasi-totalité des jardins de France. Leur nom : les troènes, les thuyas et les cyprès de Leyland. Ces espèces ont accompagné le développement des territoires périurbains français depuis les années 1930. Selon une passionnante enquête sociologique publiée sur le sujet en 2010, on trouverait aujourd’hui plusieurs centaines de millions de ces arbres dans nos jardins !
Taillées chaque année, ces espèces à croissance rapide et au feuillage persistant deviennent de véritables cloisons. Parfait donc quand on ne peut pas encadrer son voisin. Le problème, c’est que ces haies ne fleurissent pas et sont trop denses pour accueillir la faune locale, qui préfère de loin les haies vives et diversifiées. Pire, leurs feuilles sont difficilement compostables voire parfois carrément toxiques. À tel point qu’on les surnomme les murs ou les bétons verts. Tout est dit !
De nombreux écologistes, botanistes et jardiniers tentent d’inverser la tendance. Nous sommes partis à la recherche de leurs conseils pour vous aider à concevoir des haies qui soient plus intéressantes, pour vous comme pour les autres animaux et plantes des jardins.
Faire le vide
Première étape : si votre jardin est déjà doté d’une haie, la solution est probablement de vous en débarrasser petit à petit, tronçon par tronçon. Pour ce faire, il va vous falloir couper les arbres et les branches, puis laisser les souches en place (en y injectant éventuellement du lait ou du vinaigre pour s’assurer qu’elles ne repartent pas). Vous pourrez ensuite planter de nouveaux arbres entre les souches.
L’association les Haies vives d’Alsace a réalisé un petit guide très bien fait à ce sujet, où l’on trouve de nombreux comptes-rendus d’expériences. On y lit par exemple : J’ai un jardin avec cinq rangées de thuyas et j’en ai déjà enlevé une en la remplaçant par des framboisiers. J’aimerais en enlever une autre de 23 thuyas, soit environ 15 m. De l’autre côté de la haie, il y a un jardin et les thuyas faisaient de l’ombre et plus rien ne poussait correctement. Le fait d’avoir enlevé cette haie a donné de la lumière. Le voisin aussi était content de cette initiative, dans son jardin potager il y a de l’air et du soleil maintenant…
Haie à la mode thuyas mais en mieux
Une seule haie haute vous manque et votre jardin vous semble dépeuplé. Si c’est votre cas, le formateur en permaculture Franck Nathié a la solution pour vous. Il conseille de planter en haie des arbres fruitiers et de les gérer comme une vulgaire haie de troènes. Il nous a expliqué : Chez moi, nous taillons les arbres fruitiers au taille-haie, comme pour un troène. Et ça fonctionne très bien, les arbres sont très productifs. On peut le faire avec des noisetiers, des cognassiers, des poiriers, des pommiers… Il faut éviter avec les fruits à noyaux en revanche. Les arbres que vous plantez vont mettre trois à quatre ans à devenir productifs, mais on peut mettre en terre alternativement des fraises, framboises, et du cassis pour récolter dès la première année. On peut ajouter des plantes comme la consoude naine pour ne pas avoir à entretenir le sol et éviter l’apparition de ronces ou liserons.
Xavier Mathias, qui donne des formations sur les haies gourmandes pour Fermes d’avenir à la Ferme de la Bourdaisière, confirme : Constituer une haie dense n’empêche en rien d’y introduire un pommier ou un cerisier haute-tige par exemple, tel que cela se pratiquait encore fréquemment jusqu’à la fin du XIXe siècle.
Haie fruitée
Il n’atteindront jamais la hauteur et la densité d’une haie de thuyas, mais vous en tirerez de bien meilleures confitures. En plantant bien serrés et en quinconce de nombreux arbustes fruitiers, vous pouvez obtenir une jolie haie basse comestible. Pensez aux framboisiers, groseilliers, cassissiers, mûriers voire aux vignes ou aux plus petits myrtilliers et airelles, en sélectionnant selon vos besoins des variétés grimpantes, hautes, remontantes… ou non.
Haie sauvage
Les haies bocagères de nos campagnes ou les buissons sauvages inspirent également. Dans la nature, on ne rencontre ni pommier ni framboisier, mais souvent bien d’autres plantes comestibles. C’est le point de départ de la réflexion du maraîcher et enseignant en permaculture Xavier Mathias, qui nous a expliqué : Les pommiers, les pêchers, les pruniers sont des arbres qui ont été sélectionnés pendant des centaines voire des milliers d’années pour que les fruits soient plus gros, plus doux, etc. Mais quand on voit une pomme sauvage, le fruit est petit, souvent acide, avec beaucoup de pépins et peu de chair. En les comparant, il est net que les variétés sélectionnées ont l’avantage de donner des fruits plus intéressants. Bien qu’elles soient plus sujettes aux maladies.
Le formateur s’est donc intéressé aux fruits sauvages, faciles à tailler et aussi à cultiver puisqu’ils supportent pour la plupart assez bien le froid, l’excès ou le manque de soleil et d’eau, les différents types de sol… Il cite l’amélanche dont le fruit est à tomber par terre, le chalef ou eleagnus umbellata, dont les fruits se consomment en décembre, l’arbre aux faisans qui se plaît très bien en pot et donne de super résultats gourmands, insolites et esthétiques ou encore l’argousier dont il faudra tout de même cultiver plusieurs pieds mâles/femelles en plein soleil pour qu’il soit productif. Franck Nathié ajoute de prêter attention aux différentes variétés de ces plantes : L’amélanchier ovalys ne produit pas grand chose alors que les variétés américaines d’amélanchier smoky ou martin sont très productives.
Haie d’experts
Vous l’avez compris, avec votre haie, faites ce qui vous plaît. Mais plus vous miserez sur la diversité et/ou l’exotisme, plus il vous faudra vous assurer de la compatibilité des différentes plantes entre elles et avec votre terrain. Pour ce faire, misez sur le site très précis réalisé par l’association les Haies vives d’Alsace citée plus haut. Vous pourrez également vous appuyer sur la chaîne Youtube de Franck Nathié et de son association la Forêt nourricière. Trois haies expérimentales y sont présentées. Les deux premières sont constituées d’une multitude d’espèces de différentes tailles qui doivent vivre à proximité les unes des autres sur différents étages de végétation. Leur différence : l’une est arrosée, l’autre non. La troisième, exotique, comprend des espèces comme le chèvrefeuille baie de mai ou le kiwaï.
Bonjour,
Tout comme dans le Gers l’association Arbre et Paysage (http://www.ap32.fr) accompagne tous ceux qui veulent planter ou remplacer des haies, auriez vous connaissance d’une association équivalente dans l’isere (38) … a tout hasard ?
En vous remerciant par avance !
Bonjour, Oui, vous pouvez contacter Lionel de Sylve et fruit
http://www.sylvefruit.fr/Sylve_%26_Fruit/Accueil/Accueil.html
la photo montre un argousier, pas un amélanchier
La photo de la branche couverte de petits fruits orange est celle d’un argousier,pas d’un amélanchier ?…. Article très intéressant nonobstant cette petite erreur !
En 4e photo, ce n’est pas l’Amelanchier mais l’Argousier il me semble ; ce dernier a des propriétés dépuratives du sol (utilisé pour dépolluer des sites, même contaminés par radioactivité paraît-il) et surtout si on ose (épines!) cueillir ses fruits, ils sont parmi les plus riches en vitamine C
La photo dite d’amelanchier représente des argouses!
Oups, on a corrigé.
Dans le Gers l’association Arbre et Paysage accompagne tous ceux qui veulent planter ou remplacer des haies.
http://www.ap32.fr
C’est très efficace, j’ai remplacé mes tuyas il y a 5 ans, et le résultat est superbe.
framboisier et fruitiers perdront leurs feuilles en hiver et ne joueront plus leurs rôles de haies 😉
Merci. très intéressant. Pour ma part, je suis fan des noisetiers sauvages, encore très présents dans ma région de Bretagne. Ces petite noisettes à glaner en se promenant sont un régal. Cependant, la taille compulsive des haies dans les chemins de campagnes empêche de profiter des fruits.
J’ai un amelanchier, lais je rêve de cornouilles, d’épine vinette et autres argousiers……la liste des possibilités peut être encore rallongée
Bonjour. Vous êtes sûrs que le troène ne fleurit pas ? Chez moi, les pollinisateurs l’adorent… Petite remarque taquine au milieu d’un champ d’articles très bien faits et incitatifs. Merci !
Mais oui vous avez raison ! Le troène fleurit, les miens sont pleins de fleurs au printemps, petites, blanches, à l’odeur un peu spéciale, aimées des insectes ! Les oiseaux adorent aussi mes lauriers du caucase où ils se réfugient… j’en profite pour mettre les mangeoires à coté. Cela dit j’ai planté ces haies il y a longtemps, il est probable qu’aujourd’hui je mettrai d’autres essences !