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Plessé accueille la transition à bras ouverts

Un vent de démocratie directe souffle sur la Loire-Atlantique ! Les nouveaux élus de la petite ville de Plessé, tournée vers le bio, les circuits courts et la mobilité douce, font le pari d’une ruralité dynamique et nourricière.

La commune de Plessé a 30 % de ses terres agricoles en bio. De quoi irriguer les commerces du village. © Thomas Louapre

D’un air concentré, Aurélie Mézière fait défiler les pages sur son ordinateur. Par les larges fenêtres de son bureau, les rayons du soleil matinal s’accrochent aux toitures traditionnelles de la place de la mairie, en ardoises bordées de tuiles. Madame la Maire relit la gazette municipale avant impression. C’est un pavé ! souffle-t-elle. C’est qu’il s’en passe, des choses à Plessé, 5400 habitants, depuis l’élection surprise en 2020 de cette quadragénaire et de sa liste citoyenne. Arrivée il y a moins de dix ans en Loire-Atlantique, l’édile est un symbole de l’hospitalité de cette vaste commune de 10 000 hectares. Elle ne se prive pas d’accueillir à son tour un flot incessant de porteurs de projets agricoles et artisanaux, attirés par le dynamisme et la culture collaborative des nouveaux élus, qui ambitionnent même d’inaugurer le premier quartier d’habitat léger en France.

Arrivée par hasard à Plessé, Anaïs y développe son activité, emballée par le dynamisme de l’association des producteurs locaux. © Thomas Louapre

Carré VIP

Se lancer dans une élection sans programme est souvent suicidaire. C’est pourtant ce qu’a fait Aurélie Mézière, élue d’opposition lors de la mandature précédente. Avec quatre autres conseillers, on a passé six ans à se former en démocratie participative, puis on s’est présentés contre le maire sortant. On voulait montrer qu’on pouvait faire émerger un programme grâce à l’intelligence collective. Alors on a fait des réunions de quartier : les gens attendaient des discours mais nous, on les attendait avec des post-its ! C’est comme ça qu’on a monté le programme, raconte la maire, désignée tête de liste par une élection sans candidat.

Pour l’appliquer, 8 comités consultatifs de citoyens, présidés par des élus, dictent le tempo de Plessé et assurent une continuité sur les sujets prioritaires (santé et bien-être, enfance et jeunesse, développement économique, etc). Parmi ces 80 VIP (pour Volontaires Investis à Plessé), des adolescents, des actifs, des retraités. Mais on veut aussi aller chercher ceux qui ne viennent pas vers nous : avant chaque conseil municipal, on tire au sort 30 personnes à qui on envoie une invitation officielle, ajoute la maire, qui consulte aussi la population par des sondages en ligne sur proposition des comités consultatifs.

Cécile et Christophe commercialisent à la ferme leur fromage de chèvre poitevine (une race de sauvegarde). « Lors de notre installation il y a dix ans, il y a eu énormément d’entraide avec les autres éleveurs, raconte Cécile. Ici ça bouge, c’est chouette ! » © Thomas Louapre

Une PAC impecc’

Dernière consultation en date : celle sur l’installation d’un magasin de producteurs locaux dans le bourg principal, pour prolonger la dynamique du marché mensuel qui remplit déjà sans mal la grande place. On y trouve de tout, du pain aux poteries en passant par les huîtres, la farine et les paniers. Plessé, ça bouge de ouf ! s’enthousiasme Anaïs Herriau, créatrice de Savons La Planète arrivée sur le territoire il y a trois ans. Ça grouille de projets et d’initiatives, assure l’artisane qui trouve sans mal les matières premières de ses savons bio et locaux, comme le lait de vache pie noir de la Ferme des Quatre Chemins, qui donne corps à son savon « Crèmeuh ».

On voit beaucoup de porteurs de projet, ça commence à se savoir qu’on est bienveillants !

Si la dynamique a commencé avant l’arrivée des nouveaux élus, ces derniers l’ont encouragée en dédiant leur PAC (pour politique agricole communale) à l’agriculture paysanne. On a la chance d’avoir 30 % de terres en bio, un des taux les plus élevés de Loire-Atlantique, explique Aurélie Mézière, qui a été coordinatrice de Manger Bio 44. On est ruraux, c’est une vraie force, on est une terre nourricière. Dans la révision en cours du plan local d’urbanisme, on met en avant la sauvegarde des bocages et des haies, et on favorise les nouvelles installations de paysans plutôt que l’agrandissement des exploitations existantes. Prochain objectif : une cantine 100 % bio et locale, alimentée à terme par une régie alimentaire municipale sur le modèle de Mouans-Sartoux.

Anne Paillaud a installé son salon de coiffure au Dresny, un hameau de Plessé, avec son amie Marie Legentillhomme. Située en plein milieu de la campagne, la boutique ne désemplit pas, portée par l’arrivée de nouveaux habitants. © Thomas Louapre

On voit beaucoup de porteurs de projets, ça commence à se savoir qu’on est bienveillants ! s’amuse la maire qui met à disposition des bâtiments communaux à deux cafés associatifs animant chaque week-end des hameaux excentrés. Pour moi, une personne qui s’installe ici devient Plesséenne. D’ailleurs, la seule personne qui m’a fait remarquer que je n’étais pas d’ici, c’est l’ancien maire ! Plessé a aussi un attrait dû à sa situation géographique : on est excentrés, tout en étant bien placés, explique Aurélie Mézière. Il y a énormément de gens qui habitent ici et qui partent travailler ailleurs. Souvent dans les agglomérations proches, où l’immobilier est bien plus cher. Moi-même, je suis arrivée ici parce que j’ai trouvé une longère moins chère que sur l’axe Nantes-St Nazaire. Alors qu’une quarantaine de naissances ont été célébrées l’an dernier, la maire a calculé que d’ici dix ans la population devrait dépasser les 6000 habitants, soit 50 % d’augmentation en 25 ans !

Deux kilomètres de « chaussidou » ont été dessinés sur la route à l’entrée du hameau du Dresny, afin de donner la priorité aux cyclistes. Une initiative de la commission citoyenne dédiée à la mobilité douce. © Thomas Louapre

Légers Ligériens

La place manque pour accueillir tout le monde ? Qu’à cela ne tienne : pour éviter d’artificialiser de nouvelles terres, la municipalité met en place un quartier de yourtes, roulottes et autres tiny houses ! La solution a été trouvée avec une association bretonne, Hameaux Légers, qui accompagne Plessé dans la naissance d’un des premiers quartiers d’habitats légers en France, en toute légalité, sur des terrains communaux, au milieu des arbres fruitiers.  

L’habitat réversible permet à de jeunes porteurs de projet de s’installer sur leurs parcelles agricoles sans grever leur budget, il a un impact environnemental plus bas que le conventionnel, et il permet d’être propriétaire d’un logement sans l’être du terrain, détaille Thierry Lohr, adjoint et président du comité Cadre de vie et Transition territoriale.

Depuis l’annonce officielle, c’est la ruée vers Plessé : 650 candidats se sont déjà manifestés pour venir habiter léger en pays de Redon. Il y a également un vrai intérêt de la part des collectivités alentour, précise Aurélie Mézière. Ils ont des a priori, mais ils observent pour voir si ça marche vraiment. Nous, de toute façon, on aime bien essayer et expérimenter ! Et puis c’est important de réfléchir par-delà le mandat, d’agir pour le futur.

La maire Aurélie Mézière et son adjoint Thierry Lohr assument le train d’enfer donné à la transition du territoire, poussés par les membres des commissions citoyennes. © Thomas Louapre

Le paysage change vite à Plessé, au risque de déboussoler certains habitants, dubitatifs devant les deux kilomètres de chaussidou qui donnent la priorité aux vélos sur les voitures, voire clairement hostiles au projet de parc éolien porté par une coopérative de citoyens. On a envie d’être pionniers sur plein de fronts, on est ambitieux, on veut inscrire Plessé dans la démarche des villes en Transition, assume Thierry Lohr, faisant référence au mouvement lancé en 2006 en Angleterre. Même si l’on sait que d’habitude, une mairie qui fait une révision de son plan local d’urbanisme n’est pas réélue. Aux côtés de son adjoint, la maire rebondit immédiatement, sourire en coin : Oui mais nous, on s’en fiche d’être réélus !

Le bourg principal a profité d'une politique de redynamisation de la municipalité précédente et compte tous les commerces de base. L'auto-école, l'opticien et le traiteur sont installés dans des bâtiments rénovés et loués par la mairie. © Thomas Louapre

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