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Naples à Paris

Mozzarella di Nanina di Buffala di Parigi

C’est le surnom de son arrière-grand-mère mais aussi celui de son atelier de fabrication de mozzarella au lait de bufflonne. Au cœur de la capitale, Julien Carotenuto a ouvert sa boutique Nanina et fabrique un fromage comme là-bas, chez ses cousins napolitains.

Lui c'est Franco, le maître de la mozzarella. ©Manon Nougier

Il est tôt en ce jeudi de mars au 24 rue Basfroi. Le lait cru vient juste d’arriver à Paris. Le voilà dans un gros tank blanc posé sur le trottoir. Hier soir, il quittait les douces montagnes du Cantal, département au même nombre d’habitants que le 11e arrondissement. Avant-hier, il était encore dans le pis de l’une des quelque 450 bufflonnes du GIE de la Châtaigneraie, un groupement d’une douzaine d’éleveurs engagés. En Italie, les bufflonnes vivent dans des hangars, raconte Julien Carotenuto, le maître des lieux. Dans le Massif central, elles sont dehors au moins huit mois de l’année et se nourrissent d’herbe et de foin.

Ce soir, le lait sera mozzarella.

Franco Picciuolo, charlotte de fromager sur la tête, a déjà branché les tuyaux pour faire venir le lait dans la petite boutique. En quelques minutes, la cuve de 400 litres est déjà pleine. Sous la pression, une belle mousse s’est formée à la surface. On dirait un caffè macchiatto géant sans café, plaisante l’italien à l’accent délicieux. Mais il ne faut pas que le lait tombe, ajoute-t-il très sérieusement. C’est pour cela que, dans la cuve, une pale agite le lait en continu.

 

Ce matin, à 8h15 exactement, Franco a lancé la fabrication de la mozzarella du jour avec présure et ferments. On attend désormais le point de filage, explique Julien, constatant qu’aujourd’hui, il aime bien se faire attendre. Il s’agit de ce moment précis où le caillé plongé dans une eau à 80°C se met à couler et peut être mené à la baguette comme Franco sait si bien le faire. Régulièrement, depuis 14h30, dans un numéro de fromager-magicien, l’Italien tire la pâte, l’étend, la tresse. Dans ses gestes, l’Auvergne et son aligot ne semblent pas si loin. Encore une demi-heure et on peut y aller, lance Franco.

Avec 400 litres de lait, on fabrique 100 kilos de mozzarella.

Patience et persévérance

Julien profite de la pause imposée pour raconter ce qui l’a conduit jusqu’ici, depuis les cinq années de gestation de son projet jusqu’aux six premiers mois de Nanina. Déjà, il m’a fallu deux ans pour pouvoir convaincre les éleveurs du Cantal de me vendre leur lait. Ensuite, l’ancien restaurateur a dû s’attaquer à la logistique : On m’avait prévenu que ça serait mon pire ennemi, ça n’a pas loupé, c’est hyper compliqué à organiser. Au moins il n’y avait pas de mer à traverser, ajoute Franco qui, dans une autre vie, travaillait dans une ferme spécialisée dans la mozzarella à Cork, en Irlande.

J’ai fait au moins 30 allers-retours en Italie chez mes cousins, poursuit Julien. La nuit là-bas, je fabriquais la mozzarella. Pourquoi la nuit ? Bah, en Italie, tout le monde fait de la mozza, explique Franco, alors c’est la course à celle qui sera la plus fraîche. Le quinquagénaire regrette l’époque où les bufflonnes n’étaient traites qu’une seule fois par jour au petit matin et que les rythmes naturels étaient plus respectés. Mais qu’est-ce que vous voulez, en Italie, la mozzarella, c’est comme la baguette.

La pâte avant d'être plongée dans une eau à 80 °C. ©Manon Nougier

Julien a dessiné les plans de sa fromagerie, fait venir tout l’équipement d’Italie et même la saumure directement de chez ses cousins dans le coffre de sa voiture. La saumure, c’est comme le levain, elle se garde pendant des années, c’est la signature des fromages. Ce précieux liquide est un savant mélange d’eau de cuisson de la mozzarella, de petit lait et de sel. Dans l’industrie de la mozza, le fromage ne passe pas par cette étape, c’est pour cela que la nôtre a ce petit goût animal, se félicite Julien. N’essayez pas de la boire, il y a 8 à 9 % de sel, précise Franco. Notre saumure, c’est la Méditerranée.

La mozzarella Nanina se déguste fraîche mais pas froide. Il est conseillé de la manger sous les 48 heures sans la passer au frigidaire.
©Manon Nougier

L’heure tourne et le point de filage est arrivé. Les choses sérieuses commencent. Les deux hommes se mettent autour du chaudron en inox, plongent des morceaux de caillé dans l’eau chaude et, avec une grande spatule et des gestes maîtrisés, changent la pâte granuleuse en un velouté élastique. Ça, je ne sais pas encore bien le faire, l’expert c’est Franco, confie Julien ravi d’avoir réussi à embarquer dans son aventure le fromager, casaro de père en fils. La pâte ainsi modelée passe alors dans une machine à mouler des petites boules de 100 grammes qui finissent leur course dans un bain d’eau froide avant d’aller parfaire leur goût dans la fameuse saumure.

Dans quelques heures, certaines d’entre elles prendront place sur les créations de Septime, restaurant étoilé voisin. D’autres, plus simplement, se feront croquer nature accompagnées d’un bon verre de pinot grigio. Comme au pays de Nanina.

 

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Deux fois par semaine, Nanina organise des ateliers fabrication de mozzarella, laissez-vous tenter ! https://wecandoo.fr/atelier/mozzarella-italie-nanina-fromage

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