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Sous la croûte

Le petit précis de boulangerie de Maxime Bussy

Vous aimez le bon pain, celui qui tient au corps, arbore une belle croûte et se digère facilement ? Maxime Bussy nous donne quelques conseils pour éviter de se casser les dents sur du pain qui n’en est plus vraiment. C’est au Bricheton, sa boulangerie du XXe arrondissement de Paris, qu’il façonne à la main de belles tranches de vie. 

©Eloys Main

À quoi reconnaît-on un artisan boulanger ?

À partir du moment où c’est écrit boulangerie sur la devanture, on sait que ce n’est pas un point chaud, c’est-à-dire un établissement où la pâte à pain arrive congelée ou précuite avant d’être réchauffée comme c’est le cas chez Brioche Dorée ou Paul. Une boulangerie est un établissement dans lequel les employés sont titulaires d’un CAP et où tout le pain est préparé sur place.

Mais aujourd’hui, la mention artisan boulanger n’est plus garante de qualité. On a confiance en son boulanger car il façonne son pain, mais derrière on ne sait pas comment il travaille. Chez le boucher, on demande bien d’où vient la viande, alors pourquoi ne pas demander au boulanger quelle farine il utilise ? La majeure partie des boulangers dépendent d’un moulin auquel ils achètent des mix de farines et ils appliquent ensuite une recette à la lettre pour obtenir un pain calibré en goût et en forme. Et même ceux qui voudraient bien faire n’ont pas forcément accès à de la farine paysanne. Il ne faut pas chercher à reconnaître le bon pain ou chercher un label pour nous guider, il faut surtout renouer la relation avec l’artisan chez qui on achète son produit et lui poser les bonnes questions.

©Eloys Main

Quelle est votre définition du bon pain ? 

Avant même de parler de croûte épaisse ou de mie alvéolée, un bon pain est selon moi un pain digeste et nourrissant. Et pour ça, il n’y a pas de secret, il faut avoir une farine d’excellente qualité. J’achète des farines bio issues de blés anciens auprès de paysans meuniers comme Michel-Carole Patin (Pyrénées) ou Jean-Christophe Chassaigne (Gers). Les semences paysannes sont majoritairement des variétés non inscrites au catalogue du GNIS (Groupement national interprofessionnel des semences et plants). Le problème des blés modernes, c’est qu’ils contiennent un taux très important de gluten.

Si tout le monde mangeait des pains aux blés anciens, il y aurait très peu d’intolérants au gluten.

Justement, qu’est-ce que le gluten ? Faut-il en avoir peur ?

C’est la protéine du blé. Ces molécules s’enchevêtrent et plus vous travaillez la pâte, plus vous accentuez le côté élastique du gluten. Le pain va créer un tissu comme du chewing-gum, c’est ça que l’on a du mal à digérer. Les blés anciens contiennent naturellement moins de gluten et il est moins tenace, c’est-à-dire qu’il a une meilleure propension à se dégrader durant la fermentation puis la digestion. Finalement, si tout le monde mangeait des pains aux blés anciens, il y aurait très peu d’intolérants au gluten. C’est le mauvais pain que les gens ne tolèrent plus. 

©Eloys Main

Quel est le rôle de la fermentation dans la confection du pain ?

La fermentation est essentielle car elle permet de pré-digérer le gluten. Pendant cette phase, il va aussi y avoir une dégradation des acides phytiques (une molécule naturellement présente dans les céréales, ndlr) que nous ne sommes pas censés ingérer quand on mange du pain. La qualité de la fermentation dépend de la présence de levain naturel et du temps qu’on lui accorde. Durant ladite fermentation toujours, il y a également tout le réseau glutineux qui se développe et que le boulanger cherche à favoriser. C’est une espèce de peau résistante qui va enfermer les gaz et que l’on souhaite assez résistante pour qu’elle ne se déchire ni lors de la fermentation ni à la cuisson. Dans mon cas, j’obtiens ce réseau par un pétrissage manuel relativement court : moins je pétris, mieux c’est. Lorsque mon mélange est homogène, j’arrête de pétrir. Ça évite de fragiliser la pâte et permet de conserver toutes les qualités nutritionnelles. 

Qu’est-ce que le levain naturel ? Quelle est sa fonction ? 

Le levain désigne un mélange de farine et d’eau ayant fermenté grâce aux ferments naturellement présents dans la farine et aux bactéries dans l’air. Mon pain en contient 35 à 40 %. Je refuse d’ajouter de la levure car, pour moi, cela revient à ajouter des ingrédients autres que eau, farine et sel, qui ne composent pas traditionnellement le pain et qu’il ne connaît pas. La levure n’est pas forcément chimique (la levure de bière ne l’est pas par exemple), mais c’est juste que comme ce ne sont pas les mêmes bactéries que celles contenues naturellement dans le pain, elles n’agissent pas de la même manière sur la pâte. Le problème, c’est que la plupart des personnes qui les utilisent le font pour réduire les temps de fermentation. Mon pain pousse durant six heures mais le levain que j’ajoute a connu une fermentation de quinze heures. Il assure aussi une plus longue conservation à mon produit final.

©Eloys Main

Justement, comment optimiser la conservation du pain ?

À la maison, enroulez votre pain dans un torchon. Ce qui est important, c’est d’accepter qu’il sèche un peu. Au début, je n’ouvrais le fournil que trois jours par semaine car je voulais que les gens renouent avec le vrai pain qui se conserve. L’avantage qu’il soit 100 % levain, c’est qu’il ne moisira pas. Si vraiment il très sec, la petite technique de grand-mère consiste à le passer rapidement sous le robinet, de l’enfermer dans du papier aluminium puis de le glisser au four. Une fois ramolli, on le sort, on le retire du papier aluminium et on le repasse au four pour le croustillant. Là, le pain a ressuscité. 

___________

Retrouvez les pains de Maxime Bussy dans sa boulangerie Le Bricheton, 50 rue de la Réunion, 75020 Paris. @LeBrichetonOfficiel

4 commentaires

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  1. Il me semble que dans le levain, ainsi que dans la levure de boulanger, il ne s’agit pas de bactéries comme vous dites mais de champignons (Saccharomyces).

  2. Vous avez entièrement raison ,

    Le problème du gluten vient du gluten que les meuniers ajoutent dans la farine pour répondre aux exigences technologiques des boulangers et des industriels

    Ce gluten est différent du gluten natif contenu naturellement dans le blé ..
    Est il aussi porteur Nano ?

  3. Le pain de Maxime est merveilleux : gouteux, nourrissant et se conserve plusieurs jours. J’habite en face de sa boulangerie et ne mange que SON pain depuis qu’il s’est installé sous mes fenêtres! Mais attention, Maxime est un puriste, il donne du temps à son pain et n’en fait pas de façon industrielle. De même ses horaires et jours d’ouverture sont réduits, il ouvre de 17h30 à 19h et plus tard si il reste du pain…
    Renseignez-vous avant de venir, pour ne pas vous casser le nez !

  4. Holà la. J aime pas le papier aluminium. Enrouler le pain dans un torchon humide puis enlever le torchon et mettre le pain au four.
    Ça marche .

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