Le restaurant marseillais Le Présage mise depuis dix ans sur la cuisson solaire. Son fourneau fonctionne sans énergie fossile et les recettes s’y adaptent. Une première dans des cuisines professionnelles !
Un repas avec des produits locaux et de saison ? Trop facile ? Alors corsons un peu le défi : et si ce repas était cuisiné avec de l’énergie locale et renouvelable ? C’est l’ambition depuis une petite dizaine d’années d’un projet de restauration ambitieux appelé Le Présage. L’idée a germé près de Marseille (qui rime avec soleil, n’est-ce pas ?). Ce restaurant travaille avec un four solaire. Le principe de base est simple : utiliser une parabole qui va faire effet loupe et concentrer la lumière afin qu’elle chauffe un dispositif de cuisson.
Si les fours solaires se bricolent facilement chez les particuliers, il n’en existait pas de modèle adapté aux professionnels. Il a donc fallu l’inventer, nous explique Pierre-André Aubert, chef, ancien ingénieur et cofondateur du Présage.
Nous avons travaillé dès 2012 avec des Allemands qui eux avaient déjà réussi à développer un grand miroir parabolique, ce sont les seuls à en avoir développé un aussi grand, ce qui permet d’emmagasiner beaucoup d’énergie, beaucoup plus qu’un four solaire de particulier. Tout le défi ensuite, c’était de le rendre compatible avec une plaque coup de feu, qui est l’outil de base des chefs. C’est une plaque en fonte dont la température varie de 500 degrés au centre jusqu’à une température plus basse pour laisser mijoter les plats sur les bords. Cela a demandé pas mal de temps et des ajustements d’une grande précision pour parvenir à une maîtrise parfaite des températures, afin que la plaque coup de feu ne soit jamais ni trop chaude ni pas assez.
Le lieu de cuisson reste immobile et à l’intérieur (la plaque coup de feu). Le concentrateur des rayons solaires (la parabole) se trouve à l’extérieur. Le miroir secondaire se situe entre les deux.
Soleil en guinguette
Dès 2014, le four solaire fonctionne lors de fêtes citoyennes, de fêtes des plantes et lors du passage d’Alternatiba près de Marseille. En 2016 et 2017, il prend place dans un premier restaurant associatif expérimental et éphémère, près d’Aubagne, avec jusqu’à 1000 couverts servis le midi. Il rejoint ensuite une guinguette : le restaurant Le Présage se situe désormais dans un conteneur posé au milieu d’une friche, la version mobile d’un futur restaurant en dur. 4000 couverts pendant tout l’été 2021, un succès.
Au final, assure le cuisinier Pierre-André Aubert, cette équipe est parvenue à une organisation de travail similaire à un restaurant travaillant avec des énergies fossiles. Avec tout de même quelques ajustements : On n’a pas une quantité d’énergie infinie, donc il faut un peu de créativité, il faut adapter les recettes. Un exemple simple, c’est qu’on fait très rarement des pâtes, parce que ça demande de faire bouillir beaucoup d’eau, un choix énergivore. On fera plutôt une cuisson à court-bouillon, un peu comme un risotto. Dans le même genre, les fruits servis en dessert au Présage sont souvent issus d’une mini-cuisson, tels leurs magnifiques abricots tout juste ramollis par un bref passage au four. Le résultat est garanti sans acidité ni énergie fossile !
Selon le chef Aubert, les clients conquis ne viennent pas par militantisme mais parce que c’est bon. Forte de ce succès, l’équipe peut se lancer dans la version ultime du Présage. À partir de l’hiver 2024 sortira de terre l’étape finale de ce projet : un restaurant gastronomique avec un bâtiment bioclimatique, un grand jardin et une forêt comestible. Avec toujours les mêmes valeurs, jure Pierre-André Aubert : On veut parler au ventre pour éveiller les esprits. On est convaincus que l’alimentation est au fondement même de nos sociétés. Transformer les manières dont on se nourrit peut faire bouger les lignes à notre échelle et dans la société.
Super cet article, restaurant testé et approuvé il y a un an. Le concept est top et leur cuisine absolument délicieuse, foncez-y !!
Vive tous ces gens merveilleusement anticonformistes qui osent sortir des ornières du prêt à penser !
Et comme tout cela a l’air bon !