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Temps de cochon

Ode au cul noir (du Limousin)

Mâle, belle couche de graisse, cul noir, cuisse musclée, débrouillard, cherche femelle limousine, dix tétines maxi, pour perpétuer sa lignée. Me contacter en MP…

Dans la famille des bestioles typiques de nos régions , je voudrais le cul noir, qui a aussi une belle face couleur charbon soit dit en passant. De qui parle-t-on ? Allez, on n’est pas vache, on vous donne quelques indices :

1/ Taille moyenne de 80 cm. 2/ Corps trapu, arrondi, bien campé sur des membres fins. 3/ Poitrine profonde, croupe bien fournie, cuisse musclée. 4/ Reins larges, arqués dans la jeunesse, devenant droits au cours de l’engraissement. 5/ Tête conique dite tête de taupe, oreilles minces très écartées, groin étroit et allongé…

Vous avez trouvé ? Il s’agit bien sûr d’un cochon, d’une race porcine typique du Limousin qui occupe depuis plusieurs siècles l’ouest du Massif central. On l’appelle également porc de Saint-Yrieix (du nom du bled où il est né) mais c’est moins marrant. Et il raconte quoi ce cul noir ?

Le Cul noir limousin fait partie des 6 races de porcs anciennes préservées avec le Pie noir du Pays basque, le Porc blanc de l'Ouest, le Porc de Bayeux, le Porc gascon et le Porc de Corse.
Le cul noir limousin fait partie des six races de porcs anciennes préservées avec le pie noir du Pays basque, le porc blanc de l’Ouest, le porc de Bayeux, le porc gascon et le nustrale.

Il était une fois…

… au début du XXe siècle, un très important cheptel de porcs cul noir vivant dans la région Limousine. Comme les six races locales de porcs particulièrement bien adaptées à leur terroir, les culs noirs vivaient nombreux et heureux entre Montluçon et Guéret. Seulement voilà, ces beaux cochons ont un bon nombre de qualité mais le vilain défaut de prendre leur temps pour pousser. Il leur faut deux années pour pouvoir finir à la casserole. Or, après la Seconde Guerre mondiale, les temps sont durs. La famine menace les campagnes, il faut produire plus et vite. Alors on introduit  des races modernes, standardisées, du genre large white. L’élevage devient industriel et les cochons roses dûment sélectionnés éclipsent peu à peu notre cul noir local. Dans les années 1960, nouveau coup de massue : on juge le cul noir trop gras et source de cholestérol. Ce sera le début de la fin. La population est littéralement décimée : de 13 000 reproducteurs en 1953, on n’en trouve plus qu’une soixantaine en 1980.

Il a bien failli y passer comme le dodo. Heureusement les éleveurs ont su se mobiliser.
Il a bien failli y passer comme le dodo. Heureusement les éleveurs ont su se mobiliser.

Le cochon qui a eu chaud au cul noir

Heureusement, le cul noir a de fervents admirateurs. En 1993, le Syndicat des éleveurs de porc cul noir limousin se constitue pour redynamiser la production. Et le 5 novembre 1997, la race Cul Noir Limousin est officiellement reconnue par le ministère de l’Agriculture qui la rattache à la bible des races locales, le Livre généalogique collectif des races locales de porcs (LIGERAL). Grouik grouik, la bête est sauvegardée sur le papier. Sur le terrain, les éleveurs reprennent les pratiques de leurs aïeux. L’animal est élevé en plein air et grandit tranquillement (il ne pourra être mangé qu’à 18 mois quand il pèsera environ 200 kilos). Il se nourrit  de glands et de châtaignes qu’il sait très bien trouver tout seul dans les sous-bois. Notons aussi que la bête est bonne marcheuse en plus d’être particulièrement sociable. La truie, elle, est prolifique. À chaque portée annuelle, elle délivre une dizaine de porcelets, un pour chaque tétine. La nature est bien faite.

Et sinon, outre sa queue noire, ses deux grands écussons sur la tête et sur sa croupe, et ses deux épis à la Tintin, qu’a-t-il de si particulier ce joli cochon ? Il est en fait réputé pour son aptitude à faire du gras : un animal de 200 kg présente 100 kg de gras avec une épaisseur de lard sur le dos pouvant atteindre 15 cm ! Son lard est ferme et fondant, d’une douceur sensuelle et légèrement parfumée à la noisette, affirment les spécialistes. Et sa viande rouge, fine et persillée.

Et voilà un cochon heureux à caresser quelque part en Limousin.
Et voilà un cochon heureux à caresser, quelque part en Limousin.

L’histoire du cul noir se termine bien (même si elle se finit souvent au four) : notre cochon est aujourd’hui sauvé et ce, grâce à des éleveurs particulièrement passionnés. On compte aujourd’hui 150 truies et 50 verrats, élevés en liberté en Limousin à 90 % et répartis sur 38 élevages. Si vous passez par  Saint-Yrieix-La Perche, n’hésitez pas à venir leur caresser la couenne.

3 commentaires

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  1. et savez-vous qu’il existait(e?) un jeu de société dédié à ces culs noirs, la baccade : une joyeuse soupe de cartes dans laquelle chaque joueur s’efforce de réunir des familles de cochons ou de patates. Tous les coups de cochons sont permis grâce à des cartes spéciales. Le premier qui parvient à réaliser une combinaison gagne la partie ».
    De jolies illustrations pleines d’humour, un jeu familial, et belles tranches de rigolade avec les enfants garanties !

  2. Et puis Saint-Yrieix-la-Perche est une très jolie commune du Limousin que je vous invite à découvrir à la lisière de la Dordogne. Outre le cul-noir à déguster, il y a les madeleines, notamment les madeleines bébé qu’on peut trouver dans une petite boutique dans le centre-ville (place de la Nation). Vous poussez aussi découvrir les pommes du Limousin, le cidre. Et bien sûr ne partez sans avoir mangé une bonne viande limousine ou un boudin aux châtaignes que vous trouverez dans toute bonne boucherie de la ville. Bon appétit !

  3. je suis très heureuse de savoir que des éleveurs sauvent des races de porcs et bien d’autres animaux .
    défendez-vous et faites connaitre vos produits par les réseaux internet.
    quand je lis des révélations sur les pesticides dans l’agriculture, je m’inquiète pour l’avenir des agriculteurs et des éleveurs confrontés à ces lobbys de la chimie, à l’europe qui fait le jeu des puissants financiers et treider à toute cette pollution chimique.

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