Ils font leur tournée en vélo cargo, collectant les déchets alimentaires produits en ville pour les transformer en compost et nourrir ainsi les terrains agricoles ou les potagers de balcons des alentours. Tour d’horizon !
Épluchures de fruits et légumes, marc de café, restes de repas… Tous ces déchets organiques finissent bien souvent au fond de nos poubelles. Ils constituent même, selon l’Agence de l’environnement et de maîtrise de l’énergie (Ademe), plus de 30 % des ordures ménagères qui finissent enfouies ou incinérées. Disséminés dans les grandes villes françaises, des accros du compost ont senti le bon filon.
À Bordeaux, dès 2016, trois chefs d’entreprise ont ainsi créé Les Detritivores. Un projet à toute petite échelle d’abord, puisque l’objectif premier était de valoriser les biodéchets générés par le Magasin Général, le restaurant bio et locavore de l’éco-lieu Darwin à Bordeaux. Une micro-plateforme de compostage avait alors été créée sur place. L’offre a vite pris de l’ampleur, séduisant d’autres restaurateurs, entrepreneurs ou services publics.
Pas si étonnant étant donné que depuis 2016, la loi oblige les professionnels générant plus de 10 tonnes de biodéchets chaque année à les valoriser (via le compostage ou via la méthanisation, c’est-à-dire la transformation de la matière organique en biogaz). L’obligation sera étendue à tous les producteurs de biodéchets d’ici 2024. L’association bordelaise, qui emploie une dizaine de salariés, est ainsi en charge à ce jour d’une collecte auprès de 200 professionnels environ.
Compostage en circuit court
Même constat pour les Parisiens des Alchimistes, qui ont monté leur structure début 2017 pour permettre aux professionnels de la capitale d’accéder eux aussi à un service de compostage de proximité. On est sur du circuit ultra court, explique Cyrielle Callot, l’une des trois associés. Après la collecte en ville, on fabrique le compost localement (les sites de compostage se trouvent aujourd’hui dans le XVIIIᵉ arrondissement de Paris et en proche périphérie, NDLR) et on le vend à des agriculteurs des environs, à des agriculteurs urbains et à des citoyens, explique-t-elle. En parallèle de notre développement, nous avons été contactés par des porteurs de projets d’autres régions qui souhaitaient monter des antennes sur leurs territoires.
Comme Lorraine Guers, jusque-là logisticienne dans le secteur des transports et à la recherche d’un plus fort engagement environnemental et social dans son métier, qui a pris contact avec les Alchimistes pour co-fonder l’antenne marseillaise en 2019. L’objectif commun de tous ces acteurs : trouver des solutions plus vertueuses. On a voulu être dans une logique la plus écolo possible : faire la collecte en vélo et mettre en place des micro-unités de compostage en cœur de métropole, pour éviter le recours aux camions, explique Marc Ferrieux, l’un des fondateurs de Oui Compost, société créée à Lyon en 2019.
Rendre le compost attrayant
Ce choix du circuit court se veut également pédagogique. On préfère être dans une logique de sensibilisation du public en montrant les biodéchets au lieu de les cacher, ajoute l’entrepreneur lyonnais. Mais faire du compost en ville n’est pas toujours simple. L’un des gros enjeux est la gestion des nuisances possibles, notamment olfactives, précise Cyrielle des Alchimistes. Nous avons des unités micro-industrielles en cuves fermées, ce qui permet de canaliser les odeurs.
À Bordeaux, les craintes des riverains ont même poussé les Detritivores à sous-traiter le compostage temporairement à des prestataires situés en périphérie de la ville, en attendant l’ouverture de leur nouvelle plateforme dans le quartier Brazza prévu pour début 2021. La société bordelaise, qui privilégie le compostage en andains, c’est-à-dire en tas et non dans des cuves fermées, veut faire de cette plateforme un lieu de visite pour les futurs habitants des alentours afin d’ancrer le compostage au cœur des quartiers, se réjouit Lucie Ouvrard, chargée de projets des Detritivores.
Pour Marc Ferrieux, la pédagogie passe aussi par le produit lui-même. Par le compost donc, vendu par la jeune entreprise à un public urbain qui va acheter un produit 100 % local, 100 % naturel pour les plantes d’intérieur ou les petits balcons. Des points d’apport volontaire de biodéchets pour les particuliers ont été installés par Oui Compost dans certains des commerces qui vendent leur compost, ce qui rend le processus encore plus visible. On retrouve vraiment cette idée d’économie circulaire où les déchets reviennent là où ils ont été produits, mais sous forme de fertilisant. La boucle est bouclée.
De tels points de collecte permettant aux citoyens d’accéder au compostage sont aussi en cours de développement parmi les autres acteurs du secteur. Les Alchimistes, notamment, en ont mis en place dans cinq villes françaises (à Paris, Marseille, Lyon, Toulouse et Lille) ces derniers mois.
Au compost, citoyens !
Il faut dire qu’aujourd’hui, les solutions offertes aux citadins sont limitées : rares composteurs collectifs dans les jardins publics ou lombricomposteurs, parfois boudés par les citadins craignant les odeurs ou la présence de vers de terre dans leur appartement, même s’ils ne risquent pas de s’échapper de leur petite machine à composter.
Pour autant, quand on va collecter à Bayonne ou à Biarritz, on est souvent alpagués par des particuliers qui expriment le souhait d’avoir eux aussi accès à des solutions de compostage, partage Fanny Couronné de l’association basque Les Carrioles Vertes fondée l’an dernier. L’association a elle aussi pour projet de développer un réseau de consignes vertes, points d’apport volontaire de déchets compostables, à destination des citoyens, après une phase de test qui s’est déroulée cet été.
Solutions d’autant plus d’actualité, que les collectivités seront contraintes par la loi d’offrir des solutions de tri à la source des biodéchets aux particuliers dès début 2024 (la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire du 10 février 2020 met en place la généralisation de l’obligation de tri à la source des biodéchets au 31 décembre 2023). Comment ? Rien n’est encore décidé, mais les acteurs du compostage de proximité aimeraient bien faire partie de l’équation.
On ne collectera jamais tous les biodéchets des Marseillais, relativise Lorraine des Alchimistes Marseille, mais on veut y contribuer, comme on le fait aujourd’hui, en privilégiant circuits courts et mobilité douce. Même volonté de partage au Pays basque. On est convaincus qu’il n’y aura pas de solution unique, mais plutôt une multiplication d’initiatives sur le territoire qui nous permettront de tendre vers le zéro-déchet, conclut Fanny des Carrioles Vertes.
Je fais du compost dans mon jardin dans un bac fourni par la mairie. Outre les déchets de cuisine, j’y mets la tonte de ma pelouse et quelques cartons. Comment ensuite l’utiliser. Je ne sais pas la proportion ni l’époque la meilleure pour l’employer dans mes carrés potager d’1m2
Vos conseils s’il vous plaît.
Bonjour Françoise
Le compost peut être utilisé soit en le mélangeant dans le sol avant de planter (rapport 1/3 compost pour 2/3 terre). Soit comme paillage l’hiver au pied des plantations. Mettez directement une couche de 5cm de compost sur le sol puis arrosez. Les nutriments vont lentement se propager dans le sol et nourrir les plantes.
Bonne soirée
Terence
Très inspirant toutes ces initiatives! Merci