fbpx

Sobriété Eurreuse en famille

Une famille, une ferme. Bienvenue à la ferme Eurreuse, chez Agathe et Sébastien Bost, et leurs quatre enfants, tous impliqués dans l’élevage des cochons et des chèvres.

Texte : Maud Dugrand
Photos : Anne-Lore Mesnage

C’est l’heure du café, on s’installe sur la terrasse. Les pluies successives de cette fin d’été ont légèrement reverdi le jardin, un promontoire qui plonge dans le bois entourant la maison. À quelques dizaines de mètres, les six truies et le verrat de 300 kg font la sieste à l’ombre d’un chêne.

Nous sommes à la ferme Eurreuse, sur la commune d’Eurre dans la Drôme, chez Agathe et Sébastien Bost et leurs quatre enfants. On l’a trouvé un soir de bringue, je trouvais ça un peu gnangnan au début, raconte Sébastien, mais on l’a gardé. J’ai même tenté de convaincre le maire d’Eurre d’appeler les habitants les Eurreux plutôt que les Eurrois.

Au Gaec, chacun ses fonctions. Agathe est à la fromagerie et la commercialisation des fromages de chèvre, parmi les meilleurs de la vallée de la Drôme. Sébastien prend soin des chèvres, 80 laitières dont 30 chevrettes et des cochons. Les enfants aussi mettent la main à la pâte : Héïdi, 10 ans, le portrait craché de sa mère, brunette toute bronzée. Zélia, 12 ans, la blondeur du papa, dévoreuse d’Harry Potter. Antoine et Louis, respectivement au collège et au lycée agricole. L’été, on se lève à 4 h du matin avec mon père pour presser le foin, c’est-à-dire le transformer en botte, une fois qu’il a été coupé, précise Louis. Il faut qu’il soit au bon niveau d’humidité. Pour ça, je prends ma moto et je vais vérifier si c’est le moment. Puis on va à la traite, à 6 h du matin, ça dure une heure avant de retourner aux champs. La sieste, c’est après le déjeuner. On s’habitue au rythme et moi j’aime bien aider.

Agathe a quitté son Vercors et le ski de randonnée pour rejoindre Sébastien sur la ferme. Désormais co-gérante du Gaec à 50 % avec Sébastien, Agathe touche un salaire. Ce qui n’était pas le cas quand elle était encore conjointe-collaboratrice. Elle a obtenu la valorisation des acquis après cinq ans de travail sur la ferme, ce qui lui a permis de sortir de ce sous-statut qui plombe encore l’autonomie financière des femmes agricultrices.

Fils et petit-fils d’agriculteur, Sébastien a grandi au milieu des chèvres et a acheté des terres dès 2006. Quand Agathe débarque, il n’y a pas encore de maison sur l’exploitation, ni d’enfants, et les amoureux vivent en mobile-home. Puis Sébastien coupe ses dreadlocks et emprunte 100 000 euros à la banque pour construire leur maison.

L’évidence pour le fonctionnement de la ferme ? Produire peu et bien. On fait ce que l’on aime manger, résume Agathe. Le père de Sébastien vendait son lait à la cave coopérative mais sans vraiment de reconnaissance sur la qualité. Le couple a choisi l’autonomie, de leur circuit de commercialisation jusqu’à la nourriture des animaux. Si on devait acheter des aliments, ça nous coûterait trop cher. On préfère bien nourrir notre élevage grâce à une chaîne alimentaire vertueuse. Les cochons se régalent du petit-lait des chèvres mais aussi de la récupération de légumes et de fruits des voisins.

Organisation vertueuse et à taille humaine, mais le couple n’oublie pas qu’il doit nourrir les siens. Même si la ferme n’est plus sous crédit, Sébastien a retenu la leçon transmise par sa famille : Petite ferme, petite banqueroute. Le développement est mesuré et cherche à améliorer un peu le confort de travail et le statut du couple. Les porcelets sont vendus pour l’élevage et même si l’activité reste secondaire, le couple va investir pour devenir de meilleurs naisseurs. Quatre maternités seront montées sous le hangar, à côté des ballots de foin. La fromagerie s’agrandira aussi.

Élever des animaux, c’est un choix qui impose de ne pas s’éloigner de la ferme. Les vacances, c’est compliqué. D’abord parce que le service de remplacement coûte cher et que c’est délicat de confier un savoir-faire pour quelques jours. Le fromage d’Agathe est très bon car le lait des chèvres est transformé tous les jours, c’est pour cela qu’il ne sent pas fort, on ne garde pas le lait. Et sur le marché, il y a les habitués qu’on aime retrouver chaque semaine. Comme cette dame de 97 ans qui s’inquiète pour eux quand elle ne voit pas leur étal.

Avant de conduire au rugby Antoine, 14 ans, et Héïdi à la gym, on accompagne Agathe visiter les chèvres avant la traite. Son fils Louis a déjà le projet, à l’issue de son bac et d’un BTS, d’installer des vaches à la ferme, pour élargir la gamme de fromages mais aussi proposer du beurre et de la crème. Et peut-être laisser le temps à son père d’ouvrir la guinguette de ses rêves, dans les bois en dessous de la maison.

4 commentaires

Close

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

  1. C’est absolument génial ce que vous faites.
    Bravo Agathe, bravo Sébastien.
    Ta vieille tante par alliance Geneviève

  2. Quelle belle histoire, quelle belle famille, ça respire le bonheur mais aussi la sueur. Je leur souhaite tout le bonheur du monde. Merci pour vos publications, toutes plus intéressantes les unes que les autres.
    J’attends la prochaine avec impatience, c’est addictif ! bravo

Recevoir le magazine

1 newsletter par quinzaine.
No pubs, Pas de partage de donnée personnelle

Oui ?

Recevoir le magazine

1 newsletter par quinzaine.
No pubs, Pas de partage de donnée personnelle