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Co-exister c’est tromper ? Retour sur les 21e controverses de Marciac

Les 28 et 29 juillet derniers, se tenaient les 21e controverses de Marciac. En pleins battements du festival « Jazz in Marciac », la Mission Agrobiosciences réunissait une centaine de professionnels du monde agricole. Objectif ? Dialoguer, échanger, se contredire, se marrer pas mal aussi. On y était.

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Ici, interdiction de venir en costume trois pièces puisque la tenue estivale est de rigueur. Certains racontent y avoir déjà croisé le ministre de l’agriculture en chemise, bermuda, clope au bec échangeant à l’ombre des platanes. A l’image d’un festival musical éclectique on y croise une faune et une flore riches et diversifiées. Chercheurs de l’INRA, agriculteurs Gersois, psychologues interculturels, sociologues du monde rural, ou encore clowns philosophes (on vous en reparlera une prochaine fois) – tous étaient ici pour parler des enjeux de l’agriculture, refaire le monde tout en profitant du terroir et de son émulsion culturelle. Rien à voir avec les grands messes institutionnelles, à Marciac, on discute politiques agricoles sur fond de jazz de rue. A quand le prochain Salon de l’Agriculture en plein festival des Vieilles Charrues ?

 

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La ferme des 1000 vaches, le barrage de Sivens, Notre-Dame des Landes constituent autant de controverses qui ont amené les organisateurs de cette 21e édition à s’interroger sur la coexistence  possible des différents acteurs du secteur agricole. Dans le monde rural, la notion de coexistence est multiple tant elle concerne de nombreuses problématiques. La coexistence de la paysannerie et des fermes industrielles, celle des productions biologiques et des OGM, des ruraux rejoints par les urbains décidés à fuir les villes. Bref, cette thématique centrale, au cœur des enjeux agricoles d’aujourd’hui, a mis en ébullition les cerveaux.

 

Mardi 28 juillet, à l’ombre des platanes, les cercles d’échanges animés par la Mission Agrobioscience permettent à chacun, dans un premier temps, d’argumenter les controverses en comités réduits.
Mardi 28 juillet, à l’ombre des platanes, les cercles d’échanges animés par la Mission Agrobioscience permettent à chacun, dans un premier temps, d’argumenter les controverses en comités réduits.

A l’image du mariage de la carpe et du lapin, certains débats ont forcé des intervenants que tout oppose à bien vouloir s’entendre sur certains points. On a entendu des déclarations inattendues. Michèle Roux, représentante de la Confédération Paysanne, rappelait ainsi en parlant du modèle agricole intensif que « les autres paysans ne sont pas nos ennemis » tandis que Christian Pees, président du groupe coopératif Euralis, affirmait au sujet de la recherche semencière : « c’est important, il faut la financer, mais pas par la brevetabilisation du vivant ». Un premier pas vers une forme de coexistence idéologique à prendre avec beaucoup de réserve quand on sait que la guerre des semences fait rage chez les paysans de la Confédération et que de nombreux militants continuent de protester contre des formes d’agriculture industrielles souvent mieux armées pour affronter les marchés à terme et leurs jeux de spéculations.

 

Cette année à Marciac, le son des trompètes qui s’échauffent s’est mêlé aux vrombissements des tracteurs. Et dans ces situations on se dit que coexister c’est beau, mais que cohabiter c’est mieux !
Cette année à Marciac, le son des trompètes qui s’échauffent s’est mêlé aux vrombissements des tracteurs. Et dans ces situations on se dit que coexister c’est beau, mais que cohabiter c’est mieux !

Pour les éleveurs laitiers de la région, ce rassemblement fût aussi un lieu de protestation permettant de faire passer quelques revendications plutôt explicites contraignant les principaux concernés à rebrousser chemin. Si le Buena Vista Social Club jouait pour leur tournée d’adieu, Stéphane Le Foll, n’a même pas eu l’occasion d’ouvrir le bal des discussions cette année à Marciac en raison des barrages d’éleveurs en colère. FNSEA, FDSEA, Jeunes Agriculteurs : 350 agriculteurs selon les organisateurs, attendaient la venue du ministre arborant leurs pancartes « Le Foll démission » et distribuant des tracts « Wanted pour non assistance à Agriculture en danger».

 

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Enfin, ces 21e controverses n’ont pas échappé au grand discours de celui qu’ils appellent ici le père : Patrick Denoux. Psychologue interculturel, il est notamment l’auteur de « L’intelligence est dans le pré » et s’attache à étudier la coexistence sous tous les angles. Dans sa grande sagesse, l’habitué de Marciac depuis les débuts, rappelle qu’il faut avant tout connaître les autres modèles puis se reconnaître en eux. Un premier pas vers la  cohabitation. Accepter le modèle de l’autre en soi pour envisager la création de contacts interculturels c’est là, le début d’un équilibre. Une bonne piste pour passer de la compétition à la coopération.

48 heures de débat ont-ils réussi à répondre à la question initiale : « nos modèles agricoles peuvent-ils fondamentalement coexister voire cohabiter ? » Si rien n’a réellement été tranché, certaines certitudes ont flanché. Et c’est sans doute cela la magie de Marciac, déconstruire les fondamentaux pour rebâtir l’avenir autrement.

 

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