Ce ne sont ni des euros, ni des louis d’or et pourtant elles permettent de commercer. De Toulouse à Morlaix, les monnaies locales complémentaires s’invitent dans les porte-monnaie. Objectif ? Dynamiser les échanges locaux et favoriser le commerce de proximité.
Vous payez comment ? En Sol-Violette ? À la Biocoop Purpan de Toulouse, la question est posée 80 fois par jour. Françoise sort de son porte-feuilles 3 billets aux couleurs fruités et s’acquitte de son panier biologique. La caissière accepte cette drôle de monnaie avec un naturel déconcertant. La Biocoop compte parmi ces 200 structures qui depuis le printemps 2011 acceptent le Sol-Violette, la monnaie locale complémentaire de Toulouse. Françoise, quant à elle, fait partie des 2000 solistes de l’association qui dès qu’ils le peuvent paient leurs achats quotidiens avec la monnaie locale.
Mais pourquoi ne pas utiliser comme tout le monde des euros ? « C’est simple, lorsque vous payez en chèque ou en carte bleue, vous n’avez aucune idée de ce que va devenir votre argent, explique Andréa, membre active de l’association Sol-Violette. Dans 98% des cas, les paiements alimentent les marchés financiers. À l’origine, une monnaie est avant tout faite pour circuler et pour favoriser les échanges dans l’économie réelle. Avec le Sol-Violette, vous avez la garantie que la monnaie que vous utilisez restera ancrée sur le territoire et sera utilisée dans un réseau économique respectueux des êtres humains et de la nature. »
Le Sol-Violette n’est pas accepté partout. Il l’est uniquement dans l’agglomération de la ville rose et dans des établissements qui respectent une certaine éthique : épiceries bio, centres de yoga, marchands de vélo… Ne tentez pas d’acheter un double cheese en Sol-Violette, on ne vous les acceptera pas. L’intérêt de la monnaie est d’encourager les dynamiques locales, écolos et solidaires. Et sinon, on se les procure où les Sol-Violette ? Principalement dans les agences du Crédit coopératif ou du Crédit municipal. «Vos 20 euros remis à la banque sont placés dans un fonds de garantie, précise Andréa et octroyés à des initiatives relevant de l’économie sociale et solidaire sous forme de prêt ou de projets de micro-crédit. » Premier effet bonus.
« Les monnaies complémentaires ont une longue histoire, explique le site solviolette. Elles semblent avoir toujours été présentes en parallèle des monnaies officielles afin d’assurer l’équilibre économique. On en retrouve des traces en Égypte antique, au Moyen-âge ou plus récemment en Autriche suite à la crise de 1929. Il en existe de nos jours de tous types aux quatre coins du globe.»
Le second effet kiss cool réside dans l’ADN même des monnaies locales imaginées par l’économiste Patrick Viveret en 1998 : soutenir l’économie réelle. L’argent circule localement et rapidement, 3 fois plus vite que l’euro en moyenne.
Prenons un exemple. Vous achetez 10 kilos de légumes à la Biocoop en Sol-Violette. Celle-ci paye ses fournisseurs également avec cette monnaie. Les maraîchers eux-mêmes achètent leurs graines localement toujours en Sol. Lors de tous ces échanges bien réels aucun centime d’euro n’est allé nourrir les marchés et pourtant tout le monde a été payé. Sur un plan comptable, aucune évasion fiscale non plus. Les monnaies complémentaires fonctionnent comme les cartes pré-payées ou les chèques déjeuner. Les commerçants s’acquittent donc de la TVA et les salariés de leur impôt sur le revenu selon l’équation 1 Sol-Violette = 1 euro.
Les monnaies locales existent partout dans le monde. A Bristol, on peut même payer ses impôts locaux en Bristol pounds.
Il y en a beaucoup des monnaies locales en France ? Environ une soixantaine (30 en fonctionnement, 30 en construction) le plus souvent portées par des associations. Certaines ont tiré leur révérence, d’autres peinent à décoller, d’autres en revanche explosent. A Toulouse, l’équipe est plutôt fière de ses résultats. « Aujourd’hui, plus de 70 000 sols-Violette sont en circulation. Comme ils sont échangés 6 à 8 fois, on peut estimer qu’ils ont généré un chiffre d’affaires de plus de 420 000 euros. Ce n’est pas négligeable. »
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En savoir plus ?
- Comment créer une monnaie locale ? http://www.colibris-lemouvement.org/agir/guide-tnt/creer-une-monnaie-locale
- La plateforme des monnaies locales complémentaires : http://monnaie-locale-complementaire.net/
Bonjour,
Je suis vraiment emballée par cette monnaie locale et les valeurs qu’elle défend.
Est-il possible de régler des achats à la Ruche en Sols Violette ? Je ne vous trouve pas dans la liste des prestataires ?
Ce serai top !
Bonjour tout le monde,
La monnaie locale continue de se développer et arrive sur Andernos sous le nom de l »ostrea!
un concours de dessin est même organisé jusqu’au 12 juin 2015, afin d’impliquer les personnes et illustrera notre future monnaie…plus d’infos au 06.62.06.25.57 Veronique
Pour ceux qui voudraient approfondir le rôle de la monnaie et ce qu’on pourrait faire avec les SEL, puis un système financier inverse de celui d’aujourd’hui (prêts à taux zéro et taxes sur les comptes positifs), voici un lien https://esscentraliens.atlassian.net/wiki/x/CID9, sur une conférence qui a été faite en 02/2014: à regarder étape par étape, pour bien assimiler le total:-). Bon visionnage!
[…] Les monnaies locales complémentaires s'invitent dans les porte-monnaie. Objectif ? Dynamiser les échanges locaux et favoriser le commerce de proximité. […]
Bien entendu, ce n’est pas neuf. Les SEL (Service d’Échange Local) existent depuis plus de 100 ans . Le SEL est une suite logique aux monnaies locales. Celles-ci ont été la règle longtemps et étaient très répandues avant le 19e siècle. Ceci est normal, car on voyageait peu ; une monnaie valable sur un grand territoire était peu utile.Maintenant, on voyage facilement, mais on vit dans un monde restreint, donc retour aux monnaies locales.
De fait, on utilisait la monnaie locale pour le commerce local et des devises nationales ou internationales pour les échanges à longue distance.
Les personnes qui font partie d’un SEL peuvent acquérir des biens, des services et des savoirs auxquels leur pouvoir d’achat ne leur donnerait normalement pas accès. Le principe en est simple : il est fondé sur l’échange au sein d’un groupe de 30 à 2.000 personnes (en moyenne : 50). Afin que ces échanges dépassent le simple troc de biens, de services et de savoirs, le groupe définit l’unité de compte qui régit les échanges, rôle joué habituellement par la monnaie. Ainsi, même celui qui ne peut y consacrer aucune part de son budget, mais qui est membre d’un SEL, peut échanger avec tous les autres membres. Chacun possède des compétences ou peut offrir un travail simple mais apprécié au sein d’un groupe et tout (ou presque) se passe en dehors du système monétaire.