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Scarlette le Corre, cueilleuse de la mer

Connue comme le loup de mer, Scarlette le Corre cultive des algues depuis 25 ans dans la baie de Guilvinec (Finistère). Femme, marin pêcheur, droite dans ses bottes, toujours au taquet, la Bigoudène décoiffe.

Photos : Thomas Louapre
Textes : Hélène Binet

Son prénom pourrait tenir du personnage principal d’Autant en emporte le vent, tellement la sexagénaire a l’habitude de composer avec les brises ou les avis de grand frais. Il n’en est rien. « Scarline était le surnom de mon père, ça veut dire bergeronnette en breton, le petit oiseau qu’on ne peut attraper. Il me l’a transmis. » Ça lui va bien aussi. ©Thomas Louapre

Les journées de Scarlette commencent à 5 heures du matin par une sortie en mer pour pêcher. « Pour être algoculteur, il faut être reconnu comme agriculteur ou comme marin pêcheur. » Happée par la mer depuis qu’elle est née en 1955, elle sera 28 ans plus tard l’une des premières femmes à obtenir son brevet de marin pêcheur. ©Thomas Louapre

En mer, Scarlette officie au filet et rapporte selon les saisons bars, maquereaux, soles, turbots… et retourne au premier port de pêche artisanal de l’Hexagone vers 9h30 pour vendre ses poissons en direct. L’après-midi, elle s’occupe de ses algues. ©Thomas Louapre

Une partie de ses algues, les wakamés poussent sous l’eau dans des champs marins qu’elle a cultivés. « Pendant quelques mois, j’ensemence des cordelettes dans des bassins. Une fois que les semences sont bien fixées, je les enroule sur de grosses cordes et les installe en mer. » Ainsi, au large de Guilvinec, 300 mètres de guirlandes voient s’épanouir la fougère de mer si populaire au Japon ou en Corée. « Normalement je récolte une tonne de wakamé chaque année. Mais ce printemps, les fortes tempêtes ont tout emporté. » ©Thomas Louapre

Heureusement, la cueillette sauvage constitue une grosse partie de son activité très encadrée par la législation. A marée basse, quand les coefficients de marée approchent les 70/80, Scarlette va cueillir des algues sauvages sur les rochers. « J’ai mes coins, les algues ne poussent pas partout. » ©Thomas Louapre

Lorsqu’elle part récolter, Scarlette sait exactement ce qu’elle va chercher. Avec ses ciseaux, elle coupe les algues aux 2/3 de leur longueur pour qu’elles puissent se reproduire. ©Thomas Louapre

« J’ai une façon bien particulière de travailler l’algue très différente des grosses entreprises qui ramassent tout et n’importe quoi. Avec eux, c’est un vrai massacre. » ©Thomas Louapre

Dans le monde, océans et rivières abritent plus de 100 000 espèces d’algues différentes mais seules 145 d’entre elles sont consommées et 24 autorisées en France. ©Thomas Louapre

« Si la France se hisse au 4e rang des pays producteurs d’algues, c’est grâce au Finistère qui assure 90% de la production » précise Scarlette. Dans sa petite entreprise, elle en produit 5 tonnes : 1 tonne de wakamé, 1 tonne de haricots de mer, mais aussi des dulse, nori, kombu, concombres… ©Thomas Louapre

Quelle est son algue fétiche ? « Je n’ai jamais de préférence. Pour moi, c’est la diversité qui fait la richesse. Je mange tout et j’aime tout. Je suis curieuse. Je demande juste de l’amour dans ce qui est fait. » ©Thomas Louapre

De l’amour et du savoir faire, Scarlette en met beaucoup dans ses préparations. Dans son laboratoire où elle organise également des ateliers de cuisine, elle prépare ses algues fraîches ou sèches et les décline en tartare, moutarde, verrine. Parfois, elle les invite même dans un caramel au beurre salé. ©Thomas Louapre

Avec ses 16 heures de travail quotidien, on se demande où Scarlette puise son incroyable énergie. « 50 à 70% de la masse d’oxygène sur terre est produite par les algues ou les micro-algues, rappelle-t-elle. Elles doivent y être pour quelque chose.
Et de citer Confucius pour conclure : « choisissez un travail que vous aimez et vous n’aurez pas à travailler un seul jour de votre vie. » ©Thomas Louapre

A 60 ans passés, Scarlette aimerait quand même partager la barre de son embarcation, prendre un ris. « Je cherche des jeunes qui ont la niaque. J’espère trouver la perle rare. En attendant, il faut que je reste en vie encore longtemps. » ©Thomas Louapre

Pour en savoir plus : http://www.alguerie.com

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