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Du raisin au balsamique

Tournez vinaigre

De maîtresse d’école, Myriam Oddon est devenue vinaigrière autodidacte en s’installant sur un domaine agricole perché sur les côtes du Rhône. Depuis dix ans, sa production tourne au vinaigre, dans le bon sens du terme.

Chaque jour, c’est le même rituel, Myriam du domaine Blacher plonge sa tête dans ses tonneaux pour contrôler à l’œil et au nez l’évolution de ses vinaigres, de ses mélanges et de ses balsamiques. La surveillance est quotidienne, alors pour l’instant les dizaines de tonneaux de bois et de marie-jeanne sont dans la maison, en attendant la construction de la vinaigrerie.

Myriam était institutrice. Avec son mari Étienne et leurs quatre enfants, ils se sont installés il y a une dizaine d’années entre vignes et forêts, à Saint-Julien-en-Saint-Alban, en Ardèche. Perchée à flanc de coteau, la ferme était un domaine viticole en zone AOC Côtes-du-Rhône. Tout en continuant leurs métiers respectifs, Myriam et Étienne ont cherché ce qu’ils allaient pouvoir faire de tout ce raisin.

Beaucoup de gens trouvent bizarre qu’on fasse du vinaigre avec une AOC. C’est vrai que c’est un peu dommage, mais c’est comme ça, moi je fais du vinaigre et j’aime ça. Vendre de l’alcool je n’aime pas ça, donc j’en vends pas, explique tout simplement Myriam. De voyages en Italie en lectures de vieux livres de recettes et d’Histoire, jusqu’aux formations à la chambre d’agriculture, dix ans ont passé et Myriam continue de « s’amuser » à faire du vinaigre balsamique, comme elle dit.

En septembre 2019, 11 tonnes et demi de raisin ont été récoltées, soit 5000 litres de vinaigre à partir des syrah, muscat, chasselas, viognier et grenache. Myriam a toute sorte de cépages sur ses deux hectares mais elle n’en dira pas plus : Les mélanges, ce sont des secrets de vinaigriers et beaucoup de gens me tournent autour pour essayer de faire comme moi, explique celle qui a quitté l’Éducation nationale pour passer professionnelle cette année.

Vinaigre de bon vin

De ce raisin, une partie est transformée en vin pour fabriquer du vinaigre de vin. Attention, prévient-elle, il ne s’agit pas d’un mauvais vin qui tourne au vinaigre ! La piqûre acétique (qui provoque la fermentation à l’origine du vinaigre) transformera naturellement le vin, mais elle peut être provoquée par toute sorte de bactéries plus ou moins désirables. Tout le travail de Myriam consiste donc à surveiller cette transformation : C’est de la chimie en fait. Je dois ajuster avec des mélanges pour garder le bon taux de sucre dont se nourrissent les bactéries, pour garder les meilleures d’entre elles. Plus ça vieillit, plus le niveau d’acidité va s’améliorer. En d’autres termes, le vinaigre de vin, c’est des mélanges et du temps.

Le vinaigre de vin, c’est des mélanges et du temps.

Mais Myriam ne s’arrête pas là et fabrique un véritable petit plaisir pour les papilles qui change en quelques gouttes seulement une salade de fraise, un poireau vapeur ou une poêlée de noix de Saint-Jacques : un mix de vinaigre de vin et de balsamique. Pour la confection de ce deuxième élément, du moût de raisin est cuit durant plusieurs jours en chaudron et perd 80 % de volume. Il est ensuite transvasé puis conservé en tonneaux de bois dont la plupart viennent de Châteauneuf-du-Pape.

Pour les découvrir, il faut monter au grenier parce que la préparation doit geler en hiver et bouillir en été. Les molécules vont ainsi « souffrir » pour que la magie s’opère. On obtient alors ce sirop de raisin connu depuis 2000 avant J-C, comme « balsamique ». Celui du domaine Blacher ne vieillit pas douze ans, comme le veut l’AOP italienne, mais grâce à ses mélanges, Myriam parvient à faire un flacon vraiment terrible !

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