Qu’est-ce qu’on vous sert ? Du rouge ou du blanc ? Avec ou sans pesticides ? Nouveau pied dans le plat cette semaine. Au menu, un plongeon au fond du tonneau plutôt trouble. Prêts pour une belle gueule de bois ?
Ca s’agite dans les vignes de Provence. Hotte et serpette ont envahi les rangs. Entre Bandol et Cassis, les vendanges viennent tout juste de commencer. Tardives cette année – merci au printemps pourri – elles se poursuivront par le Beaujolais, le Rhône, le Bordelais pour s’achever en Bourgogne, sans doute début octobre. Les 85 000 exploitations hexagonales produiront ainsi entre 40 et 55 millions d’hectolitres, comme chaque année. Comment s’annonce ce millésime ? Médiocre au niveau quantité si l’on en croit les prévisions de la profession mais avec de belles surprises au niveau du palais. Côté pesticides, rassurez-vous, on devrait être encore largement servis.
Ah bon, vous n’étiez pas au courant ? Vous pensiez que votre petit verre de pinard tous les soirs était bon pour la santé ? S’il débouche nos artères et réjouit notre esprit, il n’est pas toujours aussi pur qu’on le croit. Déjà en 2008, les résultats d’une campagne d’analyses réalisée sur des vins du monde entier par le Pesticides Action Network Europe (PAN) donnait envie de militer chez les alcooliques anonymes. Selon les experts, 100% des vins conventionnels testés contiennent en moyenne plus de 4 résidus de pesticides différents, certains jusque 10 pesticides. Et dans certains cas, les quantités de pesticides sont jusqu’à plus de 5800 fois supérieures aux Concentrations Maximales Admissibles (CMA) autorisées par pesticide dans l’eau du robinet ! A l’époque, on essayait de se consoler en se disant que l’étude portait sur la production mondiale et que, même si l’Hexagone est depuis toujours le premier producteur de vin de la Terre, ça devait être la faute aux Chiliens.
Au printemps dernier, une nouvelle étude publiée par le laboratoire Excell nous met une fois encore la tête à l’envers. Sur les 300 vins d’Aquitaine et de la vallée du Rhône étudiés, 10 % d’entre eux (dont la plupart sont bio) ne contiennent aucun pesticide. Mais les 90 % restants portent la trace d’au moins une matière active, le plus souvent de la famille des fongicides. Les fongicides, ce sont ces molécules que les viticulteurs utilisent pour éradiquer le mildiou ou l’iodium, ces champignons capables de vous flinguer une récolte en une semaine et de les mettre sur la paille. Si les récoltes sont sauvées, sur certains crus, c’est franchement moyen : le labo a pu détecter jusqu’à neuf pesticides dans le même verre. D’accord, les quantités sont limitées, 0,3 % des pesticides retrouvés apparaissent non conformes à la réglementation actuelle. D’accord, les résultats sont meilleurs qu’il y a 7 ans où l’on trouvait 12 molécules différentes. Mais on sait désormais que ce n’est pas la dose qui fait le poison mais plutôt l’effet cocktail de tous ces résidus de chimie que l’on trouve aussi bien dans notre vin que partout ailleurs, de nos parquets à nos démaquillants. Un jour, ça va bien finir par nous péter à la figure.
On s’étonne on s’étonne mais si l’on regarde les chiffres froidement, on voit mal comment il pourrait en être autrement ? La culture de la vigne = 1,4% du territoire, 2,6% de la surface agricole utile et 20% de la totalité des pesticides utilisés. Quand on sait que la France est le 1er utilisateur de ces cochonneries en Europe (et le 3e dans le monde), on visualise tout de suite les brumes de pesticides pulvérisés sur nos grappes de raisin. On peut essayer de se rassurer en sachant que les pourcentages sont calculés à partir du poids des produits utilisés, que le cuivre et le soufre utilisés en bio pèsent bien plus lourd que leurs confrères synthétiques. En revanche, niveau toxicité on est en droit de s’inquiéter. De toutes les cultures, les raisins détiennent le record de fongicides synthétiques reçus (après les patates), classés pour certains par l’Union européenne comme comme substances carcinogènes possibles ou probables et perturbateurs endocriniens .
Et tout le monde continue à lever le coude tranquillement ? Si des études régionales tentent d’alerter l’opinion ici et là, si une association de phyto-victimes a été mise en place, si les viticulteurs sont de plus en plus nombreux à se tourner vers la bio pour garantir leur santé et celle de leurs ouvriers, si la MSA, la mutuelle des agriculteurs reconnaît de plus en plus de cancers professionnels (42 depuis 2002), l’Europe ne bouge pas. C’est pourtant elle qui fixe les fameuses LMR, les limites maximales de résidus de pesticides autorisés, un genre de ligne rouge à ne pas franchir si on ne veut pas tous y passer. « Si des LMR sont définies pour quelque 300 produits, il n’existe pas aujourd’hui de LMR Vin et seulement des LMR raisins de cuve, explique le laboratoire Excell. Ces LMR sont fixées pour une zone géographique et peuvent être notablement variables selon les molécules. » Le problème c’est que si Jésus a réussi à changer l’eau en vin, tout le monde n’a pas le même talent. Les viticulteurs n’ont pas trouvé la formule magique pour obtenir du vin naturel à partir de raisins traités. En 2005, le Ministère de l’agriculture montrait d’ailleurs que 30% des pesticides identifiés dans le raisin migraient dans le vin et que 15 pesticides dangereux pour la santé étaient systématiquement détectés à la fois sur la grappe et dans la bouteille.
On fait quoi alors, on arrête de boire ? Quand même pas. On peut se tourner vers les vins bio qui depuis 2012 ont leur label européen qui assure non seulement que les raisins ont été cultivés sans produits chimiques mais aussi que tout le processus de vinification est propre. Le problème c’est que s’ils sont de plus en plus nombreux (en 16 ans, les surfaces des vignes conduites en bio ont été multipliées par plus de 12), on peut parfois avoir du mal à les identifier. Les vignerons hésitent à mentionner sur leur étiquette les deux lettres AB, de peur de dévaloriser leur breuvage. Vous saviez-vous que le Romanée-conti était un vin biodynamique ?
On peut aussi se tourner vers les vins naturels qui, eux, ont carrément décidé de se passer non seulement de pesticides mais aussi de tout additif alors que 47 sont officiellement autorisés même si, personne n’est obligé de les indiquer sur l’étiquette. En fait le mieux c’est de s’en référer à son caviste préféré. Quand il peut vous parler des heures d’un cru, de ses vignerons, de la façon dont est traitée la terre, vous pouvez y aller. C’est sûr, il n’y aura pas beaucoup de chimie là-dedans. Plutôt beaucoup d’amour…
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Illustration de Une : Lygie Harmand
Article modifié le 25 septembre suite aux remarques des internautes. Merci à Benoît et à Raphaël pour leurs éclairages.
http://www.science20.com/agricultural_realism/why_gmo_wine_grapes_would_be_cool-121194
Un article rationnel qui développe la remarque de Raphaël sur l’intérêt des PGM en viticulture.
Autant je suis tout à fait d’accord pour dire que des progrès en la matière sont plus que nécessaires, mais le ton de l’article relève de la malhonnêteté intellectuelle (en plus d’imprécisions, volontaires ou non) la plus grossière. On dirait que vous redécouvrez l’eau tiède (oh mon Dieu y’a des pesticides dans le vin ! Les études ne datent pas d’hier…).
Les viticulteurs (pas plus que les producteurs de fruits et légumes, dont vous ne parlez pas, alors que pommiers et pêchers sont encore plus traités que la vigne) ne font pas ça de gaieté de coeur… Quel est votre but en écrivant ce brûlot bas de gamme ?
(Et punaise d’où sortez-vous cette photo du gus qui traite sa vigne avec un micro-pulvé manuel et qui s’en fout plein la tronche ? Le matos a un tout petit peu évolué les p’tits amis !)
Pour vos « 47 produits chimiques dans le vin », j’aimerais savoir d’où vous sortez ce chiffre. De plus, gélatine = ce qui entoure les articulations / Gomme arabique : issue de sève d’arbre / Enzymes = bah enzymes donc protéines naturelles (issues du champignon Aspergilus niger), j’en passe et des meilleures.
Et même les pires sagouins de l’oenologie doivent utiliser une dizaine de produits oenologiques, après ce sont des méthodes physiques (froid, chaud, filtration, etc.)
Seul le soufre, hé ouais, est un résidu de la pétrochimie. Vaut-il mieux utiliser le chimique ou aller chercher du soufre volcanique (comme le font certains) prélevé dans des conditions ultra dangereuses par des types sous-payés à Sumatra, en Jamaïque ou ailleurs ?
Revendiquer une alimentation plus saine, je le fais aussi. Taper à coup de massue sur une profession, je ne le ferai pas sans avoir tenté au minimum de m’intéresser à ses contraintes.
Tout le monde ne peut pas faire du bio ou de la biodynamie. C’est pourtant souhaitable pour notre santé, c’est clair.
Vous ne voulez plus de traitements dans les vignes ? Pas de problème, l’INRA vous propose des hybrides résistants, et même des OGM d’ici pas tard. Problème : ils donnent des raisins qui n’ont rien à voir avec les cépages actuels. Ce qui imposerait une redéfinition totale des AOP et IGP, avec le consommateur qui pigera encore moins. Accepterez-vous de ne plus reconnaître les vins que vous achetez ? De vous retrouver (j’invente) avec un vin qui ressemble à du pinot noir à Bordeaux ?
Manger mieux, manger juste, c’est le souhait de tout le monde. Pas sûr que ça soit en tombant à bras raccourcis sur une filière que ça se fera…
IL n’y a pas une filière mais 3
• le vin avec raisins et vinification non naturels.
• le vin avec raisins bio classifiés mais vinification non naturelle
• le vin libre et naturel non classifié, parfois avec label bio pour le raisin.
Il n’existe pas de classement et de label officiel européen pour les vins naturels, c’est pourquoi on les appelle libres.
LIbres, qu’ils le restent longtemps !
En réponse à « homemade mixture » qui commence à me courir avec ses vins naturels : êtes vous de la profession, ou un simple quidam amateur de ces vins ? Je pencherais vers la seconde option… Venez donc faire un tour dans les vignes, un petit mois pendant les relevages en juin, et vous verrez ce que c’est qu’une épidémie l’oïdium et/ou de mildiou qui vous pète à la gueule.
c’est facile de donner des leçons aux vignerons mais plus difficile de faire du bon vin bio de Aà Z surtout dans les règions du Nord ou la pression des maladies est plus forte.Il faut avoir les reins très solides pour se risquer à mettre en péril son exploitation en envisageant d’avoir moitié de récolte avec un raisin sain de produits phytosanitaires certes mais avec souvent des vins aux arômes bizarres et qui sont beaucoup plus fragiles pour le transport et la conservation.Il faut aussi dire que le bio n’a pas que des avantages pour la planète, plus de passages de tracteurs, plus de fuel brûlé et des sols qui accumulent du cuivre sur des décennies car la seule alternative aux pesticides est la bouillie bordelaise environ 6 kgs de cuivre par ha par an.
C’est facile de prendre un angle dans une information pour désinformer, spécialité des médias petits et grands aujourd’hui;
Toute la filière viticole a cet objectif écologique en tête plus ou moins aujourd’hui , je vous l’accorde.Mais cela ne peut pas se faire d’un coup de baguette magique par la loi ou les campagnes de propagande .Les jeunes vignerons sont très conscients de ces enjeux et il faut savoir que la réelle alternative aux pesticides dans un avenir proche seront les plants génétiquement modifiés pour résister aux maladies.Mais le lobby ecolo ne veut pas en entendre parler et arrache les plants expérimentaux pour y faire des essais.Chercher l’erreur mais le dogmatisme est sans doute plus important que le pragmatisme quand on réfléchis le cul dans son canapé .
Je pense qu’il est plus facile de mobiliser les troupes sur des articles simplistes et manichéens qu’établir une vraie analyse de la compléxité des choses.
N’oubliez pas que le vin est la boisson la plus hygiénique, qu’elle a des bienfaits pour la santé à dose modérée au niveau cardio-vasculaire , elle donne du plaisir , participe à notre rayonnement culturel dans le monde et ce serait bien de le rappeler au lieu de ne pointer que les problèmes qu’elle peut engendrer.
A votre santé à tous.
Raphael.
Donc d’après vous l’alternative se situe entre les pesticides et les OGM ?
Non, bien entendu.
De plus en plus de marchands de vins proposent des vins libres et naturels, déclassés, avec des producteurs proches avec qui on peut directement converser.
Bien entendu il y a une grosse prise de risque au début, car la vinification naturelle est instable, mais il y a un engouement autour de ces vins pas seulement pour des raisons liées à l’environnement, mais bien sûr pour leur qualités gustatives et bénéfiques pour la santé.
Il est évident que personne n’a envie de continuer à boire ces cochonneries cancérigènes, et cela ira crescendo.
Alors il est temps de prendre le virage à 180°, car vous faite déjà partie du passé en continuant sur cette voie mortifère.
Bonjour ! Cet article va être enrichi. Pourquoi ne pas y participer ? Tous vos commentaires sont les bienvenus. Vous pouvez contacter directement Hélène, la rédactrice : idf@lrqdo.fr
Une nouvelle version sera prochainement publiée.
Je suis un viti bio…ce qui n’empêche pas cet article d’être un tissu de conneries, bourré d’inexactitudes, de contrevérités, probablement écrit par quelqu’un qui n’a jamais mis les pieds dans le milieu viti, ni sur un domaine…
Sur ce blog, nous visons la qualité maximale. Si vous repérez des erreurs, signalez-les à benjamin@lrqdo.fr ; l’article sera ensuite corrigé.
C’est marrant, quand on va lire l’étude d’Excell, on est beaucoup moins inquiet qu’en vous lisant : « 90 % des vins analysés contiennent des traces de résidus de pesticides mais seulement 0,3 % apparaissent non conformes à la réglementation actuelle. »
Curieux comme vous vous gardez bien de citer ce chiffre de 0.3%, ce qui aurait permis à ce billet de bénéficier d’un peu d’honnêteté intellectuelle, à défaut de rigueur scientifique.
Effectivement l’étude Excell, d’ailleurs présentée en lien, montre que sur 90 % des vins analysés contiennent des traces de résidus de pesticides mais seulement 0,3 % apparaissent non conformes à la réglementation actuelle. Mais comme nous l’expliquons plus bas dans l’article, la réglementation actuelle comporte des lacunes. Il n’existe pas de LMR (limites maximales de résidus de pesticides autorisés) pour le vin, uniquement pour les raisins. Par ailleurs, les chercheurs (notamment ceux de l’Inserm) sont de plus en plus nombreux à affirmer que sur le plan des pesticides, ce n’est pas la dose qui fait le poison mais l’effet cocktail de toutes ces molécules que l’on trouve aussi bien dans notre vin que partout ailleurs.
Ce que l’article ne dit pas, c’est qu’il y a heureusement plein d’initiatives qui vont dans le bon sens : tout le mouvement des vins naturels, la démarche + NATURE du laboratoire Excell mais également le label européen sur les vins biologiques qui, depuis 2012, assure un procédé bio sur toute la ligne, de la culture du raisin à la mise en bouteille.
Merci, merci, merci…
On se bat tous les jours pour lutter envers et contre tous ces produits chimiques, ces grands groupes qui nous gouvernent (Mosanto, et plus près de nous Limagrain…)
Malheureusement la « bonne parole » n’est pas facile à entendre, et on nous prends très souvent pour des « tarrés » !!
Je prendrai bien un verre de vin…bio évidemment