Par Amélie Durand - Moudallal, 18 octobre 2014

Imaginez un quart de siècle à voir un métier artisanal devenir industriel, à côtoyer des pratiques parfois douteuses, à travailler un produit qui oublie souvent d’où il vient. Imaginez un homme dont le rêve est d’être éleveur de bovins, qui aspire à voir naître ses bêtes, vivre, les soigner et surtout offrir une viande de grande qualité.

Alors il y a 10 ans, Christian achète une ferme en ruines dans le centre Manche qui n’avait pas été habitée depuis 47 ans. Son projet de vie c’est en couple qu’il le réalise. Avec sa femme Sonia il créé le GAEC de la Mare aux Pois en 2014 à Millières. Pendant que Christian cumule son emploi de boucher à l’extérieur et l’élevage des bovins à la ferme, Sonia retourne sur les bancs de l’école pour obtenir un diplôme agricole.

Aujourd’hui, l’exploitation compte 64 vaches et 2 taureaux. Certaines ont un petit sobriquet.  «Parfois Christian s’attache et on leur donne un petit nom. Evidemment, après il ne peut pas les emmener à l’abattoir. Celles-là, on les garde jusqu’à leur dernier souffle» confie Sonia. Tiens d’ailleurs voilà Christian qui nous présente la doyenne du troupeau : « elle nous a donné une dizaine de veaux. »

A la Mare aux Pois, la reproduction est naturelle. « On a des vêlages toute l’année, certains éleveurs choisissent l’insémination artificielle pour avoir toutes les naissances à la même période,  pas nous ». Aussi, leur intervention est minimale quand l’animal met bas.  « On s’adapte, il y a des vaches qui n’aiment pas que l’on reste à côté d’elles ».

Dans le troupeau on croise des races Normandes, blondes d’Aquitaine ou encore des Limousines. Elles sont choyées par le couple qui emploie des méthodes de traitement naturel. On trouve par exemple des jardinières d’ail ou des blocs de sel à disposition des animaux en prévention des maladies.

Pour pouvoir établir le GAEC Sonia a du obtenir son diplôme d’agricultrice. Pendant sa formation, elle a découvert des pratiques agricoles parfois très éloignées de sa vision du respect de l’animal. «  On passe pour des extra-terrestres et ça n’a pas toujours été facile de trouver des terrains agricoles…». Aujourd’hui, pour puiser de l’inspiration et se ressourcer, le couple va régulièrement sur le terrain rencontrer d’autres exploitations, principalement en bio. En retour, ils reçoivent avec plaisir particuliers ou professionnels pour faire visiter leur ferme  «  il suffit de nous appeler avant pour être sûrs qu’on soit là, nous n’avons rien à cacher ! »

L’an dernier pour parfaire son projet et réaliser ce qui lui tenait à coeur – la traçabilité –  Christian fait construire son laboratoire, aidé par des subventions européennes. Il peut désormais transformer la viande et exercer à plein temps son métier de boucher à la ferme. « Certaines clientes veulent me voir découper la viande », parce que la découpe est un art qui donne toute la dimension à cette viande de grande qualité.

Une grande partie de la production est vendue en direct sur l’exploitation, souvent par colis de 10 kilos minimum. « Nous avons des personnes qui viennent de Paris et font l’aller-retour dans la journée ! ». Leur viande est aussi distribuée dans un supermarché du canton où les consommateurs peuvent enfin savoir qui a élevé et préparé leur steak haché.

Pour en savoir plus, c’est là sur France 3.