Si vous vous promenez dans la région nantaise, au pays du muscadet, arrêtez-vous au domaine Complémen’ Terre à la Haie-Fouassière. Vous y croiserez peut-être les lumineux vignerons Manu Landron et Marion Pescheux. Ils vous expliqueront dans un sourire que ce qui fait vraiment résonner un vin, c’est l’âme qu’on y met.
Texte et photos de Julie Subiry
Le vin naturel, ce n’est pas un label, c’est un art de vivre ! Dans un monde où tout va vite, Manuel Landron et Marion Pescheux, jeunes vigneron et vigneronne du pays nantais, ont fait le choix du lâcher-prise et travaillent au rythme de la nature.
Petit, Manu est tombé dans la marmite de muscadet ! Son grand-père, Pierre, crée les domaines Landron dans les années 1950, au départ, une petite exploitation de 3 hectares. Puis Joe, son père, acquiert de nouvelles parcelles. En 1987, il a un déclic : ses vignes manquent d’être empoisonnées par un désherbant. Joe cesse alors de les utiliser et se met à pratiquer le labour. En 2002, il obtient la certification Ecocert. En 2011, viendra le label Demeter, lié à la pratique biodynamique.
En 2013, après une année initiatique passée à l’autre bout du monde (Chili, Nouvelle-Zélande) pour approfondir leurs connaissances en biodynamie et travailler leur premier vin naturel, Manu et Marion reviennent au bercail, le pays du muscadet. C’est à la Haie-Fouassière, au pied du château d’eau, qu’ils créent leur domaine, Complémen’Terre. Pour louer vignes et cave, il a d’abord fallu convaincre. Ça n’a pas été chose facile : Le temps de la nature n’est pas celui de la société… ni celui du banquier !
Leur première exigence à la reprise du flambeau : le respect de la nature et du vivant. Cela commence à la vigne, où Manu et Marion cultivent en bio. 90 % de leur temps de travail y est consacré. Pour améliorer la biodiversité autour de leurs vignes, ils vont installer des ruches et faire de la polyculture. Et pour garantir la qualité de leur vin, ils ont obtenu le label Nature et Progrès qui soutient des entreprises à taille humaine, éthiques et solidaires.
La suite se passe à la cave où l’enjeu est de rester à l’écoute du vivant. Il ne faut pas gâcher le raisin avec trop d’intrants, la modération est de mise. Comme la plupart des vignerons nature, Manu et Marion vinifient sans l’aide d’œnologue. Si leur objectif est surtout d’obtenir un bon muscadet en respectant l’identité de leur parcelle, ils s’essayent toutefois à quelques expériences.
Une fois que le vin est en cuve, Manu y inscrit des mots doux pour que le vin se sente bien : joie, paix, gratitude, bonheur, merci, scintillement… On transmet notre être à tout ce qui est vivant, dit-il, c’est pourquoi, on se doit d’être dans un bon état d’esprit.
Pour Marion, qui a découvert la vigne par la biodynamie, faire du vin naturel, c’est transmettre aux gens la pureté du travail à la vigne. On élève nos vins comme des enfants : on leur apporte surveillance et attention, le soutien dont ils ont besoin. Mais finalement, ils grandissent tout seuls.
Le vin naturel est vivant, preuve en est : pour leur dernière cuvée, Manu et Marion ont changé l’étiquette d’un de leur muscadet, le Mortier Gobin. Le traditionnel Château a laissé place à une étiquette peinte à la main par une amie artiste. Depuis, vous le croirez ou non, le vin s’est bonifié !
Si 60 % de ses ventes se font à l’export, Marion tient aussi à rencontrer sa clientèle locale, comme ici à Rouge Bouteille, un bistrot du quartier Zola, à Nantes.
Au bar, Nicolas, le patron qui s’est installé en 2012 pour partager sa passion pour les vins naturels, Yoann et Julie orientent les clients dans leurs choix. Le melon de Bourgogne, le cépage du muscadet, habite les huit cuvées de Manu et Marion. Pour en dessiner les contours, certes, un peu de théorie est nécessaire, mais selon eux, en matière de vins naturels, la connaissance passe essentiellement par le ressenti. Ce n’est pas qu’une question de goût, c’est une histoire d’humain, de terroir.
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